Longlegs : Une esthétique réussie, mais un fond creux
« Longlegs » de Osgood Perkins est un film qui semble conçu pour diviser l’opinion. D’un côté, il offre une atmosphère oppressante et un mystère captivant, renforcé par une esthétique visuelle sombre qui rappelle les œuvres de David Fincher. L’ambiance est si macabre qu’elle en devient presque insoutenable, plongeant les spectateurs dans une tension palpable. Pourtant, cette maîtrise technique, bien que remarquable, ne parvient pas toujours à masquer les faiblesses du scénario, qui, bien que minutieusement élaboré, manque parfois de profondeur émotionnelle et s’appuie trop sur des tropes familiers du genre.
Le film suit l’agent du FBI Lee Harker (Maika Monroe), chargée d’une enquête sur une série de meurtres rituels orchestrés par un mystérieux tueur en série surnommé Longlegs, incarné par Nicolas Cage. Ce dernier, dans un rôle à la fois terrifiant et théâtral, livre une performance qui marquera les esprits. Nicolas Cage, souvent critiqué pour sa tendance à « surjouer », trouve ici un rôle qui exploite parfaitement cette inclination. Effroyable croisement entre Hannibal Lecter, le Joker (version Joaquin Phoenix) et Pennywise, le personnage de Longlegs semble destiné à s’inscrire au panthéon des méchants du cinéma d’horreur. Bien que sa performance soit mémorable, elle ne parvient pas toujours à transcender le masque de son personnage pour livrer une réelle profondeur.
Le film s’ouvre sur un prologue anxiogène tourné en format 4/3, rappelant avec ses coins arrondis un vieil album photo, et qui plante le décor d’une exploration des traumatismes de jeunesse dans les années 1970. L’action se transporte ensuite dans les années 1990, période où l’enquête prend une tournure surnaturelle. Malheureusement, cette orientation surnaturelle, combinée à une conclusion ouverte, a laissé beaucoup de spectateurs sur leur faim, y compris moi-même. Les nombreuses questions sans réponse et l’absence d’une conclusion claire donnent au film une impression d’inachevé qui frustre davantage qu’elle ne satisfait.
Là où « Longlegs » brille véritablement, c’est dans sa capacité à créer une atmosphère de malaise et de terreur latente. Le réalisateur joue habilement avec les angles de caméra et les effets sonores pour maintenir une tension constante, tandis que la direction photo d’Andres Arochi sublime chaque scène avec une netteté aveuglante, une élégance austère et des ombres sculptées qui renforcent le malaise ambiant. Cependant, malgré cette atmosphère malaisante et cette esthétique réussie, le film manque cruellement d’originalité. Il apparaît davantage comme un patchwork superficiel de plusieurs films emblématiques du genre, tels que Silence of the Lambs, Sinister, Angel Heart, et Zodiac, plutôt qu’une œuvre véritablement unique et innovante. Ce manque d’originalité contribue à renforcer l’impression d’un film qui, malgré ses qualités esthétiques, reste en surface sans jamais plonger vraiment dans le sujet qu’il aborde.
Un autre point notable concerne l’aspect surnaturel du film, notamment les machinations du grand méchant Satan et de ses disciples. Comme c’est souvent le cas dans ce type de récits, Longlegs tombe dans le piège de ne jamais expliciter pourquoi ces personnages sont si obsédés par la réalisation de sacrifices ésotériques suivant une prétendue logique numérologique. Pour les spectateurs athées ou sceptiques, cette absence de motivation claire du maître des enfers pour justifier ces massacres dans le monde des vivants devient rapidement lassante. Faute d’une explication tangible, ces actes de violence semblent dépourvus de sens et peinent à légitimer leur importance au sein de l’intrigue.
En fin de compte, « Longlegs » est un thriller efficace mais quelque peu creux, qui impressionne par son esthétique soignée et la performance de ses acteurs, mais qui déçoit par sa superficialité narrative et son manque d’originalité. Force est de constater que Longlegs n’arrive aucunement au niveau de ces films qui l’ont manifestement inspiré, et s’avère finalement un film oubliable, sans réelle identité. Pour les amateurs de thrillers psychologiques à l’atmosphère lourde, « Longlegs » reste une expérience à ne pas manquer, bien qu’il puisse laisser sur leur faim ceux qui recherchent une profondeur émotionnelle et narrative plus prononcée.
Longlegs
- -L'agent du FBI Lee Harker est chargée d'une affaire de tueur en série non résolue qui prend des tournures inattendues, révélant l'existence de l'occulte. Le cas devient de plus en plus personnel pour Harker alors qu'elle doit arrêter l'assassin avant qu'il ne frappe à nouveau.