Elemental, l’alchimie réussie entre émotion et différence
J’abordais Elemental avec une méfiance nourrie par une fatigue bien réelle face à l’approche parfois appuyée de Disney concernant certains messages contemporains. Or, dès les premières minutes, le film de Peter Sohn trouve une manière de conjuguer sensibilité sociale et plaisir du récit, sans s’abandonner aux excès redoutés. Le résultat, malgré une performance décevante au box-office, témoigne davantage d’un climat culturel saturé que d’un manque de qualité intrinsèque. On retrouve dans Elemental cette volonté de concilier fable accessible et réflexion sociopolitique, une démarche que Pixar maîtrise généralement mieux que bien des studios, comme en témoignent Inside Out ou Zootopia qui abordaient déjà l’altérité sous un angle métaphorique puissant.
La force du film réside justement dans sa subtilité. Plutôt que de transformer ses personnages en slogans, Elemental préfère raconter comment des êtres issus de mondes incompatibles apprennent à s’observer, à se comprendre et à composer ensemble. Cette approche rappelle le doigté de The Iron Giant, autre œuvre où la coexistence reposait davantage sur la confiance mutuelle que sur un discours programmatique. Ici, le thème se cristallise de façon particulièrement touchante dans la relation père-fille, construite autour du symbolisme du feu sacré transmis de génération en génération. Cette métaphore de l’héritage, profondément ancrée dans la diaspora culturelle évoquée par le film, parvient à conjuguer émotion intime et regard social sans jamais forcer le trait.
Certes, l’intrigue repose sur une structure narrative plutôt prévisible, un écueil fréquent chez Pixar depuis Onward. Toutefois, la richesse visuelle de Elemental, sa direction artistique inspirée et la sincérité des relations humaines compensent largement cette familiarité. La construction du monde, avec ses architectures fluides et ses interactions physiques entre éléments antagonistes, crée un décor d’une inventivité qui évoque parfois la fantaisie colorée d’Encanto, tout en se distinguant par une poésie propre.
Il demeure regrettable que Elemental n’ait pas obtenu la reconnaissance commerciale qu’il méritait, car il réussit ce que beaucoup de productions récentes échouent à accomplir, offrir un récit inclusif sans naïveté, porteur de valeurs sans dogmatisme. Le film se déploie comme une fable sur la coexistence entre différences, mais il le fait en donnant d’abord priorité à la tendresse, à l’humour et à la dynamique intergénérationnelle. Cette humilité narrative lui permet d’échapper aux pièges du prosélytisme et de rejoindre un public large, particulièrement les préadolescents qui y trouveront un récit fondé sur l’écoute, la responsabilité et l’affirmation de soi.
En définitive, Elemental confirme que Pixar demeure capable, malgré quelques années plus inégales, de créer des œuvres à hauteur humaine. Le film réussit à apaiser mes appréhensions initiales et rappelle qu’une histoire simple, lorsqu’elle est portée par une vision sincère et un univers cohérent, peut encore toucher profondément. À mes yeux, Elemental se mérite 7 sur 10, un bon film qui mérite de s’épanouir malgré un accueil commercial injustement timide.
Élémentaire
- -Dans la ville d’Element City, le feu, l’eau, la terre et l’air vivent dans la plus parfaite harmonie. C’est ici que résident Flam, une jeune femme intrépide et vive d’esprit, au caractère bien trempé, et Flack, un garçon sentimental et amusant, plutôt suiveur dans l’âme. L’amitié qu’ils se portent remet en question les croyances de Flam sur le monde dans lequel ils vivent...
