L’Expérience Belko, quand le massacre remplace la pensée

L’Expérience Belko s’annonçait comme une étude implacable des comportements humains en situation extrême, mais le résultat final se limite à un exercice de brutalité mécanique qui peine à justifier sa propre existence. Greg McLean, qui a pourtant démontré son sens du malaise psychologique dans Wolf Creek, se retrouve ici pris au piège d’un concept enfermé sur lui-même. Le dispositif de bureau transformé en arène de mort se veut une allégorie du capitalisme déshumanisant, un thème déjà exploré avec plus de lucidité dans Snowpiercer ou dans Mayhem, mais la mise en scène évite soigneusement toute véritable lecture sociopolitique et se rabat sur une violence graphique qui tient lieu de pensée.
Cette allégorie manquée apparaît dès les premières scènes, qui installent trop rapidement un manichéisme fatigant entre les bons employés et les cyniques prêts à tout pour survivre. Là où Battle Royale réussissait à troubler le spectateur par l’ambiguïté morale de ses protagonistes, L’Expérience Belko s’empêtre dans des codes balisés. La caméra suggère à peine les dilemmes que traverse ce groupe d’ouvriers et de cadres, comme si le film craignait d’offrir une quelconque profondeur psychologique. Le récit avance ainsi par à-coups, sans jamais prendre le temps de développer des trajectoires qui permettraient d’éprouver la violence autrement que comme un choc répétitif.
L’ennui s’installe d’autant plus vite que les scènes d’action manquent de tension. Le huis clos, qui aurait pu rappeler l’efficacité claustrophobe de Cube, ne trouve jamais son rythme. Les personnages demeurent des silhouettes fonctionnelles, incapables de susciter la moindre empathie malgré les efforts de McLean pour multiplier les moments pseudo-émotifs. La violence mécanique prend la place du suspense, ce qui appauvrit encore le propos déjà fragile. On se surprend à anticiper chaque revirement, chaque élimination, chaque élan de panique, un peu comme si le film suivait avec application un cahier de charges dépourvu d’âme.
La conclusion tente bien de renverser la perspective mais cette ultime pirouette ressemble davantage à un crochet artificiel qu’à un véritable commentaire sur les systèmes de domination modernes. Le film se clôt ainsi sur une impression d’inachevé, comme s’il avait perdu le courage d’explorer jusqu’au bout les implications politiques de son propre dispositif. Pour celles et ceux qui cherchent un divertissement sanglant, L’Expérience Belko fera peut-être l’affaire, mais quiconque espère une réflexion solide sur la nature humaine gagnera à se tourner vers Battle Royale ou Cube, des œuvres qui, elles, parviennent à conjuguer tension, invention et pensée sociale. Dans l’ensemble, ce film m’a laissé sur une impression marquée de déception et ne mérite guère plus de deux étoiles sur cinq.

The Belko Experiment
- -Bienvenue chez Belko Industries, un bureau qui va se transformer en une bataille royale sanglante d'une horreur à glacer le sang lorsque 80 employés sont enfermés dans leur immeuble et forcés de jouer à un jeu impitoyable : tuer ou être tué !


























