Le vrai Problème du PQ
En abordant mon sujet de prédilection Monsieur Martineau par votre dernière chronique, « Offre d’emploi », je manquerais totalement d’opportunisme en ratant cette chance de finalement pouvoir m’exprimer sur ce sujet qui m’habite déjà depuis plusieurs années. Parce que vous savez, pour des « médiatiquement anonyme » comme moi , nous n’avons pas l’opportunité d’être entendu quand nous le voulons, considérant surtout que nos missives ne sont que trop souvent pas au goût de certains rédacteurs en chef fédéraliste. Peu importe, il est toujours intéressant de voir un généraliste décrire un sujet sur lequel nous nous considérons spécialisé, il est toujours intéressant de lire ce que l’ont dit de vous à l’extérieur.
Alors, même si je vous considère toujours comme un adversaire politique, je dois admettre que cette fois-ci vous m’avez étonné, vous vous êtes amélioré dans vos analyses politiques. Même si vous avez décidément adopté le style « en surface » pour couvrir plus large, vous avez réussi à dépeindre merveilleusement bien la schizophrénie des québécois et de son organe politique par lequel elle se manifeste. (En passant la caricature l’avion du PQ en perdition est de loin l’une de vos meilleurs depuis longtemps, je l’ai rie vraiment longtemps… quoique nerveusement) .
Ainsi, à l’aide de votre cynisme habituel, vous décrivez tout le drame du PQ: c’est à dire celui de concilier le fardeau d’avoir à gouverner au gré des problèmes quotidiens, tout en faisant la promotion d’un projet de société plus approprié aux besoins des québécois. Concilier l’adaptation à la réalité du moment, tout en travaillant par le rêve à modifier cette réalité vers l’idéal. Voilà toute l’art d’une révolution tranquille.
Il faut dire cependant aussi que nos dirigeant au PQ se sont habitués à leur petit pouvoir, et s’accommodent finalement tant bien que mal de leur statut. Alors puisqu’il est aussi dans le rôle d’un parti politique de gagner les élections et de se maintenir au pouvoir, le PQ en arrive à être principalement électoraliste en ne travaillant plus que pour lui-même. Or, en voulant s’accrocher au pouvoir à tout prix, il démontre et accepte l’illusion que le cadre fédéraliste n’est pas un obstacle au développement du Québec, ou pis encore, il compromet la souveraineté en l’associant dans l’opinion publique au gouvernement péquiste (ce que vous les médias contribuez à entretenir) qui se montre incapable de réussir ses réformes adéquatement à cause de ce carcan fédéral. Dans cette état de dualité permanente, les dirigeants du PQ tentent d’anesthésier les militants (attendre les conditions gagnantes sans essayer de les provoquer) pour ne pas nuire à l’action gouvernementale. Nous en sommes donc dans une situation ou le parti Québécois et ses attachés politiques salariés, affrontent au nom du pouvoir, les militants… et donc l’âme du parti. Alors ce n’est pas un conflit entre radicaux et modérés, mais bien un entre volonté d’agir et passivité. Dans ce contexte il est difficile de trouver le temps et l’énergie pour développer notre stratégie référendaire. N’oubliez pas Monsieur Martineau, un militant est un bénévole sacrifiant de son temps pour réaliser un idéal politique. S’il s’avère que le chef de ces militants, qui plus est un ancien fédéraliste, ne soit pas en mesure d’avancer dans le sens de cet idéal, ou bloque simplement la liberté d’expression de ceux s’activant pour cet idéal, la porte de sortie lui est désignée.
Dans cette guerre démocratique pour le contrôle du territoire québécois, les enjeux sont gros et les méthodes à la mesure de ces enjeux. Le gouvernement fédéral à bien profité de notre fardeau administratif pour cogiter en toute quiétude les moyens nécessaires pour déstabiliser toute menace à son pouvoir. Que ce soit par l’infiltration au PQ, la corruption, le contrôle de l’information médiatique et l’adoption de lois anti-démocratiques, le gouvernement fédéral a déployé toute une panoplie de moyens matériels et symboliques pour renforcer l’identité canadienne. D’ailleurs, les médias tentent encore de marginaliser les vrais militants souverainistes en radicaux racistes de par l’affaire Michaud; cela, il est triste de constater, avec l’aide de notre ancien chef Lucien Bouchard.
Que d’énergie dépensée pour faire en sorte que rien ne bouge. Que d’énergie pour nous empêcher de détenir les pouvoirs indispensables pour assurer notre culture dans le contexte de mondialisation. Mais, survie culturelle oblige, on ne pourra pas nier longtemps la volonté de changement que l’évolution requiert. Dans ce contexte référendaire permanent, du fait de notre simple existence, le vote est polarisé entre indépendantistes et fédéraliste. Cette situation ne nous donne pas l’éventail diversifié de parti qu’offre un pays normalement constitué. Cela fait en sorte que nous nous retrouvons dans une situation stérile où l’avenir ne nous appartient plus. Le Parti Libéral est composé de carriéristes vendus aux intérêts de la classe établie, et le Parti Québécois n’est que le rassemblement contre-nature entre diverses idéologies souhaitant se réaliser dans un Pays indépendant. Vous comprendrez donc que le projet d’indépendance nationale au Québec est le ciment unissant les diverses tendances au PQ, et qu’il est hors de question de remettre en considération ce concept, bien qu’il doit être actualisé. par de nouveau débat. Nous allons sauver le Parti de la division en reparlant de nouveau de ce qui est la seule voix pour sortir de l’impasse politique au Canada. C’est ainsi que nos actions pourront atteindre de nouveau l’imaginaire collectif.
Des bancs de l’opposition, purifié de nos carriéristes conservateurs, nous nous reconstruirons autour d’un chef aussi dévoué à la cause que l’étaient Lévesque et Parizeau. N’en déplaise à vous quand vous affirmez que monsieur et madame « Tout-le-monde » se foutent de la souveraineté comme de leur première chemise, le projet d’indépendance est cyclique, et reviendra constamment dans les enjeux de notre actualité politique.. cela jusqu’à ce que l’indépendance se réalise… ou que nous devenons démographiquement minoritaire. Comme le dit si bien Claude Lessard, le Québec est en guerre civile tranquille, une lutte à finir entre résistants et collaborateurs en territoire passif.
En lisant votre dernier article, vous faite un bilan de tous les incohérences au Parti Québécois. Cela est de votre devoir en tant que journalistes de s’en apercevoir et de nous le démontrer. Mais vous vous devez aussi d’être objectifs en expliquant les causes de cette situation. Par ce manque flagrant, j’en arrive à croire que vous vous réjouissez de cette situation. Ainsi je pense que vous en arrivez par vos chroniques superficielles à être un spécialiste des images caricaturales et systématiquement négatives du projet d’émancipation nationale. Vous devriez savoir que la presse ne devrait pas s’élever en acteur de la démocratie, mais plutôt en être son serviteur. Si vous ne voulez pas mettre en lumière nos idées politiques, ayez au moins le courage d’amener d’autres solutions… si il y en à d’autres bien évidemment. Vous nous décrivez comme un vaste dispensaire psychiatrique, mais vous refusez de dire les conclusions qui s’imposent pour changer cette situation. En conclusion, disons que vous êtes à l’image du parfait petit colonisé ne pouvant concevoir un instant de vivre par lui-même sans ses chaînes.
Quand je vois des citoyens mépriser les voluptés des puissants, braver l’insécurité économique et sacrifier leur temps pour gagner leur indépendance, je sens que ce n’est pas à des esclaves qu’il appartient de raisonner de liberté.
À bon entendeur Monsieur Martineau
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18 janvier 2001
Offre d’emploi
Par Richard Martineau
Le Conseil exécutif national du Parti québécois, un parti politique créé en 1968 par René Lévesque, recherche un chef charismatique qui l’aidera à remporter les prochaines élections provinciales.
TÂCHE
La personne choisie devra plaire autant à monsieur et madame Tout-le-monde (qui se foutent de la souveraineté comme de leur première chemise) qu’aux militants du comté de Mercier (qui seraient prêts à mourir pour la patrie).
Elle devra sortir le Québec d’un cul-de-sac qui persiste depuis 40 ans.
Elle devra travailler de concert avec le gouvernement fédéral afin de mettre sur pied des programmes susceptibles d’améliorer le sort des Québécois tout en faisant mousser l’option séparatiste avec l’aide d’un parti siégeant à la Chambre des communes (pour des clarifications, voir l’annexe AD-17-5).
Le chef du PQ poursuivra deux missions: protéger et stimuler la culture des Québécois francophones de souche, et gagner la confiance des membres des minorités linguistiques.
Il devra resserrer les liens avec la France, qui se bat contre l’hégémonie américaine, tout en brassant des affaires avec nos puissants voisins du sud, qui détestent les Français.
Le futur chef du Parti québécois (et futur premier ministre de la province) devra être maître dans l’art des pirouettes. Par exemple, il devra être capable de dénoncer avec véhémence le gouvernement fédéral pour sa mauvaise utilisation de ses surplus budgétaires, tout en cachant les surplus de son propre gouvernement dans des organismes sans but lucratif. De même, il devra exhorter le peuple à encourager le savoir-faire québécois (« Maîtres chez nous! »), tout en plaçant une bonne partie du Trésor de l’État dans des fiducies basées à Toronto.
Il sera à la fois POUR la protection des petites cultures distinctes et POUR la mondialisation. Il ne perdra pas une occasion de rappeler le martyre des Patriotes, pendus pour avoir voulu défendre leur pays, tout en déroulant le tapis rouge pour recevoir le premier ministre de la Chine (qui lave son linge sale dans le sang du peuple tibétain).
Le nouveau chef devra aussi maîtriser le double langage. Par exemple, lorsque l’économie québécoise se portera bien, il dira que c’est grâce à son gouvernement; et lorsqu’elle se portera mal, il dira que c’est à cause du gouvernement fédéral.
EXIGENCES
Avoir une famille (c’est bon pour l’image), mais accepter de ne jamais la voir. Se sentir bien entre l’arbre et l’écorce. Avoir de solides liens dans le Parti depuis plusieurs décennies, tout en incarnant le renouveau.
Accepter d’être traîné dans la boue par ses propres militants (tendance masochiste, un atout).
Parler couramment l’anglais.
Aimer les longues balades en auto sur l’autoroute 20.
QUALIFICATIONS
Doctorat en économie et en administration.
Maîtrise en comptabilité de management ou en sciences comptables.
Bac en marketing.
Solide expérience dans le secteur privé.
Bonne connaissance des mathématiques financières et de la tenue de livres.
(Intérêt pour l’art et pour l’Histoire facultatif.)
RÉMUNÉRATION
150 000 $ par année. (Mais l’assurance couvre les maladies nerveuses.)
Note: Nous invitons les juifs, les anglophones et les membres d’une minorité
ethnique à préciser, dans leur demande d’emploi, leur appartenance à l’un des
groupes visés par notre politique d’égalité d’accès à l’emploi.
Envoyez votre C.V. et votre photo à la permanence nationale du Parti
québécois, 1200, avenue Papineau, bureau 150, Montréal (Québec), H2K 4R5.
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En terminant, je vous laisse sur ce courriel que m’a envoyé notre collaborateur
Michel Trudeau, psychologue:
« Selon les résultats du dernier sondage sur le départ de Lucien Bouchard, les Québécois sont très satisfaits de son travail, mais contents qu’il parte. Ils sont d’accord pour dire que la cause indépendantiste recule, mais une majorité
d’entre eux voterait Oui avant répartition des indécis. Et ils trouvent que Lucien Bouchard est un bon premier ministre, mais admettent qu’il n’a pas réalisé grand-chose…
Ce pays est-il oui ou non un vaste dispensaire psychiatrique? »