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Posté par le 4 août 2025 dans Politique nationale

La droite québécoise, et le Québec tout entier, méritent mieux qu’Éric Duhaime

Pourquoi Éric Duhaime doit perdre à Arthabaska : plaidoyer pour une réforme électorale et une droite québécoise enfin crédible.

Prêt à tout pour accéder au pouvoir, Éric Duhaime jongle sans gêne entre contradictions, faussetés et promesses creuses. Car pour lui, visiblement, la fin justifie les moyens — quitte à sacrifier la vérité en chemin.

Celles et ceux qui me lisent régulièrement savent déjà que je ne suis pas de droite. Je suis un indépendantiste de centre gauche, convaincu que le Québec a besoin d’un État fort, d’un filet social robuste et d’un projet national ambitieux pour relever les défis de notre époque. Mais, à l’heure où le débat politique se polarise et où les frontières idéologiques s’estompent, il me paraît utile de le rappeler dès le départ afin de préciser clairement d’où je parle, notamment pour mes nouveaux lecteurs. Car au-delà de mes convictions politiques, je demeure profondément démocrate. Et, à ce titre, je ne peux rester insensible à l’injustice persistante que constitue, au Québec, notre mode de scrutin uninominal à un tour.

Le 3 octobre 2022, lors des dernières élections générales, cinq partis ont franchi le seuil symbolique de 12 % des voix. Pourtant, leur représentation en sièges était sans commune mesure :

  • Coalition avenir Québec : 40,98 % des voix, 90 sièges
  • Parti libéral du Québec : 14,37 %, 21 sièges
  • Québec solidaire : 15,43 %, 11 sièges
  • Parti québécois : 14,61 %, 3 sièges
  • Parti conservateur du Québec : 12,91 %, 0 siège

Autrement dit, quatre partis d’opposition gravitaient autour de 15 %, mais leur représentation variait de zéro à vingt-et-un députés. Le Parti conservateur du Québec, avec plus d’un demi-million de voix, n’a obtenu aucun siège. Peu importe ce que l’on pense de ses idées, ce résultat constitue un déni flagrant de démocratie.

Le scrutin uninominal à un tour, héritage de notre passé colonial, fausse systématiquement la volonté populaire au Québec. Il avantage artificiellement les partis qui concentrent leurs appuis dans quelques régions au détriment de ceux dont le soutien est plus diffus. Depuis quarante ans, chaque formation politique ayant promis de corriger cette distorsion a abandonné ses engagements dès qu’elle en a bénéficié.

  • Parti libéral du Québec (PLQ). Formation fédéraliste par excellence, le PLQ aura ponctuellement dénoncé les injustices du mode de scrutin lorsqu’il siégeait dans l’opposition. Pourtant, il a refusé de signer le pacte de mai 2018 en faveur d’un scrutin proportionnel mixte. En 2022, malgré une quatrième place au vote populaire, il est parvenu à conserver son statut d’opposition officielle, grâce à la concentration de ses appuis dans l’île de Montréal. Un avantage net, qui démontre à quel point ce système fausse la représentation nationale. Pourquoi le PLQ voudrait-il changer un mode de scrutin qui continue de lui garantir un rôle disproportionné, sans avoir à convaincre une majorité de Québécois francophone ?
  • Parti québécois (PQ). Sous René Lévesque, le PQ répétait que la réforme électorale viendrait « une fois l’indépendance réalisée ». Quarante ans plus tard, cette promesse demeure non tenue. Dans l’opposition, le PQ dénonce les distorsions électorales ; au pouvoir, il reporte toujours cette modernisation institutionnelle.
  • Coalition avenir Québec (CAQ). En 2019, la CAQ déposait le projet de loi 39 visant à instaurer un scrutin proportionnel mixte, avec un référendum prévu en 2022. Une fois bien installé au pouvoir, le gouvernement Legault a abandonné discrètement ce projet en avril 2021 sous prétexte de pandémie. Profiter avant de réformer : voilà une stratégie politique malheureusement récurrente.
  • Québec solidaire (QS). Longtemps promoteur enthousiaste de la proportionnelle, QS s’est muré dans le silence après 2022. Pire, certains de ses militants ont applaudi l’exclusion du PCQ de l’Assemblée nationale, comme si une distorsion devenait légitime dès lors qu’elle frappait un adversaire politique. Défendre la démocratie uniquement quand elle nous avantage revient à la trahir.
  • Parti libéral du Canada (PLC). Le renoncement provincial a son écho à Ottawa. En 2015, Justin Trudeau promettait que ce scrutin serait « le dernier sous le système majoritaire ». Majoritaire, il enterra cette réforme, contribuant au cynisme politique ambiant dans tout le pays.

Les larmes de crocodile de Justin Trudeau au sujet de la réforme démocratique qu’il n’aura jamais réussi à instaurer

On ne peut s’étonner, dans un tel contexte, que des figures populistes comme Éric Duhaime prospèrent. En démocratie, le ressentiment n’apparaît pas par hasard : il se nourrit des inégalités structurelles et se renforce chaque fois qu’un parti abandonne ses engagements de réforme au profit d’intérêts partisans.

En se proclamant « ni fédéraliste ni souverainiste » dans Facebook, Christian Dufour cautionne implicitement ce statu quo canadien. Son soutien à Duhaime, au nom d’une prétendue « vitalité démocratique », révèle une résignation inquiétante : refuser de choisir entre dépendance et liberté, c’est choisir l’immobilisme.

C’est précisément ici que je pose la limite. Je peux reconnaître que le Parti conservateur du Québec mériterait moralement une représentation parlementaire. Mais je refuse que cette légitimité soit incarnée par Éric Duhaime. Derrière ses slogans libertariens et conservateurs, Duhaime pratique une politique fondée sur le ressentiment, qui dégrade le débat public. Manipulateur et hargneux, il alimente constamment le cynisme dont il prétend être victime. Il ne débat pas, il déforme. Il ne propose pas, il s’oppose. Il se contredit sans cesse tout en s’indignant d’être mal compris.

En quelques semaines seulement, le chef du Parti Conservateur du Québec a dit plus de 32 inexactitudes pour tenter de se faire élire dans Arthabaska-L’Érable.Au Parti Québécois, on préfère faire campagne avec de la rigueur. On respecte l’intelligence des citoyens. On vous dit ce qu’on propose, on vous l’explique, puis on vous laisse juger. Voici une liste de ses inexactitudes pour vous permettre de vérifier certaines de ses affirmations et de confirmer que ce qu’il dit est souvent à prendre avec un grain de sel. Parce que les faits ont encore leurs droits.

Pour mesurer l’ampleur des approximations, faussetés et manipulations d’Éric Duhaime, je vous invite à consulter ce travail rigoureux de vérification des faits réalisé par le Parti québécois : lesinexactitudesderic.com. Les citoyens méritent mieux que cette manipulation.

Permettez-moi d’ouvrir ici une parenthèse à destination de mon lectorat de gauche. Il existe plusieurs droites au Québec : religieuse, nationaliste identitaire, néolibérale, autoritaire, libertarienne, etc. D’ailleurs, Éric Duhaime, qui se revendiquait libertarien avec le Réseau Liberté Québec fondé en 2010, est aujourd’hui la caricature médiatique de cette mouvance. D’autre part À Québec (la ville), une droite populiste, alimentée par les radios d’opinion telles que CHOI Radio X, a émergé sous la forme de la « droite Metallica » : fédéraliste tonitruante, anti-élites, et fièrement provocatrice. Derrière ce discours viril et tapageur se cache souvent un complexe identitaire, prêt à sacrifier l’originalité québécoise au profit d’un désir  d’assimilation à l’intérieur des États-Unis d’Amérique.

Je partage largement l’analyse de Mathieu Bock-Côté : Éric Duhaime aurait pu incarner un courant nationaliste de droite utile au débat démocratique, mais il a opté pour le populisme, la démagogie et la polarisation. Là où je diverge radicalement, c’est sur sa conclusion : « Il vaut mieux que ça. » Honnêtement, je ne le crois pas. Sa campagne dans Arthabaska, fondée sur les mensonges et le ressentiment, n’est pas un accident, mais la démonstration cohérente de sa véritable nature politique : une figure toxique, incompatible avec les aspirations du camp du Oui et indigne de confiance.

Parce qu’une autre droite est possible : celle qui questionne le rôle de l’État, propose des réformes structurelles, défend la sécurité et la rigueur sans céder à la caricature. Une droite enracinée, capable de dialoguer sereinement avec ses adversaires. Certains conservateurs critiques d’Ottawa pourraient même devenir des alliés d’un projet indépendantiste. Cette éventualité ne m’effraie pas ; elle m’intéresse, car un véritable projet national se construit face à des interlocuteurs solides.

Cependant, cette droite ne pourra émerger que dans une démocratie assainie : un système qui cesse de récompenser les partis trahissant leurs promesses et respecte la voix de chaque électeur. Voilà pourquoi une réforme du mode de scrutin, intégrant une dose de proportionnalité, est devenue indispensable. Une telle réforme offrirait enfin un espace politique juste, à droite comme à gauche. Elle permettrait notamment l’affirmation d’une droite nationaliste véritablement indépendantiste, dont le Québec a besoin pour équilibrer et enrichir le débat démocratique. Du même souffle, elle libérerait également le potentiel de mon propre courant politique, celui d’une gauche social-démocrate indépendantiste lucide, capable d’articuler une vision progressiste sans céder aux dérives du wokisme. Les écologistes, eux aussi, trouveraient enfin un cadre stable leur permettant de pérenniser leur présence essentielle à l’Assemblée nationale, plutôt que de voir leur influence fluctuer au gré des calculs électoraux des grandes formations. Cette pluralité saine permettrait enfin à chaque courant idéologique significatif d’être représenté équitablement et de contribuer pleinement à l’avenir du Québec.

En conclusion, l’élection partielle du 11 août 2025, dans Arthabaska, dépasse les individus en lice. Elle représente une occasion cruciale pour le Parti québécois d’affirmer sa crédibilité en vue des prochaines élections générales. Élire Alex Boissonneault, enraciné et porteur d’un projet clair, serait choisir la profondeur plutôt que la provocation.

Une élection partielle entre le chef du PCQ et le candidat vedette du PQ

À l’inverse, une défaite d’Éric Duhaime obligerait le Parti conservateur à se demander s’il souhaite devenir sérieux ou rester prisonnier d’un tribun diviseur. Pour la démocratie québécoise, le choix est clair.

Mieux vaut de la mauvaise information que pas d’information pantoute
– Éric Duhaime

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