Jour 2: Paris (première partie)
Mon sommeil à l’hôtel ne fut pas très long. En effet, nous devions nous réveiller très tôt pour prendre l’autobus réservé à notre escient par l’OFQJ. Celui-ci aura en même temps deux fonctions. La première étant de nous faire visiter Paris, puis, dans un second temps, nous reconduire dans l’une des gares de la capitale française pour entamer la diaspora québécoise en sol européen.
En déjeunant (dire en France petit-déjeuner) avec mes compatriotes, je remarque par nos discussions, avoir été le seul à s’être aventuré la veille au-delà du 13e arrondissement (vive le roller!). De mon côté, je n’ai toujours pas reçu de courriel de David et Florence. Pour David, je ne m’en fais pas trop, car il m’attend officiellement pour cette journée. Pour Florence, j’aurais préféré la rencontrer à ma première journée, l’idée étant d’avoir le maximum de temps ensemble à notre disposition. Cependant, à ce moment, cela fait déjà cinq jours qu’elle est en France… et rien ne manifeste qu’elle considère notre rencontre comme une priorité. Alors, j’oriente mon agenda sur le rendez-vous qu’elle m’a donné antérieurement dans l’éventualité que nous n’arriverons pas à reprendre contact en France, soit à 15 h devant la basilique Notre-Dame. Le plan est donc de déposer mes valises au logement avant ma rencontre avec Florence. Ici, même si je ne m’attends a rien de particulier, je dois quand même avouer attendre ce moment depuis une éternité… et d’ailleurs, il est vrai, j’ai fait le nécessaire pour faire coïncider le début de mon stage avec le transit de Florence en France. En effet, cette dernière est une grande voyageuse, et revenait elle-même d’un stage de quatre mois au Burkina Faso. Paris sera donc le point de jonction de nos deux itinéraires… et l’espace-temps que j’ai choisi pour faire le point sur notre indéfinissable relation.
Nous débutons donc notre visite guidée de la Ville-Lumière aux alentours de 9 h. Successivement, nous passons ainsi devant des endroits qui font de Paris ce joyau de l’humanité. L’effet est particulier : je n’ai pas vraiment dormi, je ressens même encore l’effet de l’alcool ingurgité la veille dans mon organisme… et il y a des bâtiments de la trempe de l’Arc de Triomphe et du Palais du Louvre qui défile à qui mieux mieux sous mes yeux. Tout cela semble irréel, j’ai vraiment l’impression d’être assis dans un cinéma en train de regarder un documentaire sur Paris. La belle Marianne à mes côtés est tout excitée par ce cortège de monuments historiques, et se précipite d’un bord à l’autre du bus pour photographier ce qu’elle peut. Il est vrai qu’elle quitte Paris dans deux heures pour aller étudier huit mois à Lyon. Moi, j’ai quand même quatre mois devant mois pour me taper une visite de la ville en profondeur
Et soudainement, en haut des toits dans le ciel, nous apparaît le sommet de la tour Eiffel. Un drôle de silence s’empare de l’autobus ; assurément, cette imposante charpente métallique à quelque chose de fascinant. Toutefois, je ressens comme un profond vide. Il faut dire, en effet, que pour moi, cette construction représente beaucoup. En effet, au début de l’année à Montréal, j’ai accroché dans ma chambre un cadre laminé de la tour Eiffel devant mon bureau. L’idée était, bien sûr, de me motiver à ramer vers l’objectif de mon projet de stage, mais quelque part aussi, il y avait une certaine mystique promesse d’un grand rendez-vous. Vous comprendrez… j’associais allègrement ici la tour Eiffel à ma prochaine rencontre avec Florence.
Cependant, force est donc de constater qu’elle est en retard au rendez-vous. J’essaye donc de relativiser ce fait en me disant que cette rencontre sera simplement plus tard dans le temps (mais le temps passe tellement vite)… peut-être aussi que, finalement, ce rendez-vous n’est pas avec elle. Mais bon, encore une fois, je me fais beaucoup trop de cinéma ; et de toute façon, l’autobus arrive pragmatiquement à destination. Nous débarquons donc… exactement dans l’angle dans lequel a été photographiée la tour Eiffel sur mon laminé à Montréal ( à la Place du Trocadéro). J’ai tellement souvent regardé ce point de vue ; le sentiment de déjà-vu est énorme. Je me console donc, car je vis une grande réalisation personnelle. Mais je n’aurai pas vraiment l’occasion de me laisser aller dans cet état d’esprit tellement je suis assailli par une horde de vendeurs itinérants. De toute ma vie, je n’aurai jamais été autant sollicité en ce sens. Tels des bêtes fondants sur un troupeau, ces vendeurs aux regards affamés arrivent en courant de tous les côtés à la fois, n’hésitant pas à vous bousculer pour prendre l’initiative sur un compétiteur; certains vous tireront même les manches pour vous montrer leurs babioles à monnayer. Et ne pensez pas que si vous dites fermement non à l’un, l’autre comprendra le message que vous ne voulez rien acheter. Le pire, c’est que la plupart de ces vendeurs ne connaissent même pas la langue du pays. En définitive, le seul moyen concret de leur échapper, c’est de quitter les lieux. C’est d’ailleurs vraiment à se demander pourquoi leur présence est socialement tolérée. En effet, cette activité ne contribue en rien de positif pour l’accueil des touristes et à l’image de la France. De toute façon, étant complètement déshydraté, je me résigne rapidement à quitter le centre du belvédère pour la périphérie où se trouvent des petits restaurants-minute dans des roulottes mobiles. Tout ça, pour découvrir avec stupéfaction l’endroit au monde où l’eau coûte le plus cher : 4 € la petite bouteille Evian ! Me croyez-vous ?
Après donc nous avoir porté à l’autre extrémité de la tour Eiffel aux Champs de Mars, l’autobus entamera la tournée des adieux en nous déposant chacun notre tour à des gares préalablement définies. Premier arrêt, la gare de Lyon. Ce sera à Marianne, Yannick et Julie-Anne de partir. Je décide diligemment de les aider à transporter leurs valises. En entrant dans la gare, je suis frappé par la ressemblance du décor avec un fond d’écran d’ordinateur fourni avec le classique Windows 95 que j’affectionnais particulièrement, précisément celui dénommé « Voyage ». Nous nous quittons en nous promettant tous de nous revoir pour éventuellement prendre un Gin Tonic à Paris. Le deuxième arrêt de l’autobus est à la gare du Nord dans le 10e arrondissement… et ce sera donc à mon tour de prendre mon billet de départ. Maude, Émilie et JP m’aideront donc à transporter mes valises jusqu’à mon nouveau domicile. En effet, puisqu’ils ne partiront seulement pour Lille que le 4 septembre, je leur ai proposé de passer par chez moi.
Nous sommes alors chaleureusement accueillis par David, celui avec qui j’habiterai quatre mois. S’en suivra un moment particulier. En effet, bien que David nous recevra en grande pompe avec une sélection de vins et fromages, notre discussion en toile de fond sera relativement lourde du fait que Maude est liée par tradition familiale au parti Libéral du Québec (et puisque vous savez à quel point j’apprécie le PLQ, je vous laisse deviner ici la teneur de mes propos). Quelque part, David aura donc eu droit d’entrer à un aperçu du débat politique québécois.
Toutefois, ce qui m’importe vraiment à ce moment, c’est mon rendez-vous avec Florence. En mentionnant son prénom, David m’apprend qu’elle lui a laissé ses coordonnées téléphoniques… chez son nouveau copain en Normandie. Moment magique, nous nous reparlons donc de vive voix, et nous nous fixons un nouveau rendez-vous, cette fois à 17 h 20 à la gare St-Lazarre. Mais surtout, Florence m’annonce de me préparer à passer une nuit blanche…Tout est donc possible. Or, puisque l’impératif étant d’être le plus frais possible pour la soirée, une sieste s’impose donc… et je m’empresserai alors de terminer promptement les célébrations afin de recharger mes énergies par une nécessaire sieste.
« Tout afflue à Paris »
– Jean-Jacques Rousseau (Extrait de Emile ou de l’éducation)
Je me demande quand viendra la 2e partie, puisque dans le titre c’est inscrit première partie !