Le carré de sable québécois
Et voilà, après des lustres, la gauche française revient à la présidence. De notre côté cependant, peut-être aurez-vous remarqué que nos médias parleront plutôt de la victoire de François Hollande et non pas celle de son parti (socialiste). Car voyez-vous, ce mot-là, honnis par nos élites, appartiendrait à une autre époque et n’existerait plus que dans les vieux livres d’histoires. Il ne faudrait surtout pas ramener à notre esprit des noms chargés de potentiel subversif.
Il est vrai que dans la belle province du Québec nous ne sommes pas encouragés à trop nous éloigner de ce que sarcastiquement je dénomme l’extrême centre. Dans les faits, nous sommes toujours une colonie n’ayant pas le réel pouvoir d’autodétermination. Alors, parce que nos parlementaires s’amusent à faire de la politique dans les limites du cadre provincial octroyé, nos capacités de projection démocratique en sont fort limitées.
Dans un même ordre d’idée, les idéologies de nos partis dominants ne sont pas très marquées. Il faut dire que notre mode de scrutin (uninominal à un tour) handicape fortement (le mot est faible) l’émergence de nouvelles forces politiques. Subséquemment, notre conscience collective est particulièrement atteinte par notre état de colonie; comme si nous n’étions pas en mesure de pouvoir réfléchir par nous-mêmes à notre avenir collectif.
À contrario, en France, l’élection du président se décide au suffrage universel et il y a deux tours à tous les paliers électifs (quitte à pouvoir opérer des collaborations entre certains partis). Bref, il y a de la place pour toutes les idées du monde, de l’extrême gauche à l’extrême droite. Puis chaque citoyen est disposé à être politisé, peu importe sa classe sociale ou son niveau d’éducation. Voilà qui est bien dynamique n’est-ce pas? Voilà qui déborde de vitalité démocratique. Voilà simplement qui est le propre d’un pays ayant une culture issue de son état d’indépendance.
Et pendant que les Français réfléchissent, débattent et évoluent, nous au Québec on attend après ce qu’on nous présentera comme le changement… mais sans pour autant nous donner le loisir de librement s’exprimer sur ledit changement nécessaire.
La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité
– Albert Camus