Ressourcement ministériel
FINALEMENT: un activiste écologiste devient ministre de l’Environnement au Québec. Toutefois, étant donné l’incroyable talent de Daniel Breton pour mettre en correspondance l’écologie avec la production d’énergie (renouvelable), puis la nationalisation des ressources naturelles comme condition pour atteindre l’indépendance énergétique, j’aurais davantage vu ce dernier ministre aux Ressources naturelles. Mais ça, c’était ce que je disais AVANT le jour 1 du cabinet Marois.
En effet, moins de 24 h après son assermentation, la toute fraiche ministre aux Ressources naturelles, Martine Ouellette, a confirmé que le gouvernement de Pauline Marois imposerait un moratoire complet sur l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste au Québec (!!!). Mieux encore, elle ira même d’un acte de foi en affirmant : «Je ne vois pas le jour où il y aura des technologies qui permettront une exploitation sécuritaire». (Notons toutefois que cette déclaration sera aujourd’hui atténuée par Madame Marois, qui profitera aussi de l’occasion pour sécuriser le milieu des affaires).
Lettre d’une jeune politicienne… à Lucien Bouchard. (La blague est de Josée Legault)
Voilà qui tranche définitivement avec l’ère de l’exploitation effrénée des ressources pour le seul enrichissement privé des amis du régime libéral (moi j’appelle ça la corruption institutionnalisée). Alors, il n’est pas étonnant que l’ex-ministre des Finances, Raymond Bachand, voit d’un mauvais œil la nomination de ces deux « idéologues » écologistes (Martine Ouellet et Daniel Breton) au cabinet ministériel.
En réponse à ces détracteurs, Daniel Breton exprimera dans son Facebook (oui, Daniel est un politicien moderne) :
«Un ministre de l’environnement qui vient du milieu de l’environnement? « Shocking! » Il est tout même pour le moins étrange que certains commentateurs voient cela comme un problème si on ne remet pas en question le fait que:
•quelqu’un qui vient du milieu de la médecine se retrouve à la santé,
•quelqu’un qui vient du milieu des arts se retrouve à la culture ou
•quelqu’un qui vient du milieu économique se retrouve aux finances…»
Pourtant, comme le dit si bien Pierre Dubuc ici, «Qu’a fait de si extraordinaire l’équipe économique du Parti libéral pour le Québec, qu’ont fait les Raymond Bachand, Clément Gignac et Laurent Lessard (pour notre économie), sinon de concéder à bas prix nos ressources naturelles à des multinationales, augmenter de façon vertigineuse l’endettement du Québec et néolibéraliser la fiscalité avec le recours tous azimuts à la tarification?»
Puis franchement, soyons sérieux, il faut être particulièrement aliéné pour disqualifier un ministre à pouvoir s’occuper d’environnement… parce qu’il dénote justement une conscience environnementale. En ce sens, l’un des pires exemples mondiaux se retrouve dans notre merveilleux pays. En effet, quel «bonze de l’économie» locale s’objecte que dans les gouvernements Harper, il s’est succédé des ministres de l’environnement s’avérant des agents à la solde de l’industrie pétrolière pour faire saboter les accords internationaux? (Comme pour notre retrait du protocole de Kyoto).
Et d’ailleurs, cet exemple exprime à quel point le monde des finances (il faut arrêter de laisser à leur disposition l’utilisation du terme «économie») a su imposer ses dogmes économiques au cœur idéologique de nos gouvernements contemporains. Car, cette croyance en la main invisible du marché libre, le néolibéralisme, est une doctrine encore plus idéologique que serait celle de porter une conscience environnementale. En effet, tout adepte au discours néolibéral moindrement sérieux finit par comprendre le mensonge à la base de ce système. Voyons donc, comment peut-on croire en un système économique se basant sur la croissance infinie de l’exploitation des ressources naturelles quand nous évoluons dans un environnement limité (une planète) ? La réponse, parce que faire la promotion du néolibéralisme et de protéger ce système permet d’avoir une part des richesses exploités.
Dans un même ordre d’idée, il n’est pas étonnant que ce soit dans l’exercice des métiers liés implicitement à la gestion du capital (banquiers, comptables, hommes d’affaires) où se retrouve statistiquement la corruption.
Alors, il faudra saisir que dans l’enrichissement des multinationales privées exploitant l’environnement, il se retrouve une activité antagoniste au développement durable. Si bien qu’il n’est pas tant ici question d’idéologie que finalement d’intérêts divergents. Subséquemment, dans cette rivalité politique, il y a ceux qui ont l’intérêt du profit immédiat (intrinsèquement sensibles à la corruption), contre ceux ayant l’intérêt collectif comme guide de conduite. Pour la suite des choses cependant, dans une perspective de survie à long terme, tous les politiciens devraient se retrouver un jour dans la deuxième catégorie. Mais ça, c’est ici justement où se retrouve le test d’intelligence collectif de l’humanité.
En terminant, il apparait qu’avec l’élection du Parti Québécois, on a finalement gagné une bataille environnementale… mais on n’est loin d’avoir gagné la guerre. Et comme l’a dit Luc Lefebvre dans son Facebook, on pourra seulement déclarer victoire le jour où nos ressources naturelles seront nationalisées, voire lorsque nous serons indépendants politiquement. Mais la bonne nouvelle en attendant, il semble que l’on a stoppé l’hémorragie et ramené l’environnement à la place centrale qu’il mérite politiquement.
On est rendus au XXIe siècle. Il est temps que les Verts soient au pouvoir»
– Daniel Breton durant son assermentation