L’élection de tous les dangers
La dramatique élection présente au Québec est selon ma perspective la plus intéressante auxquelles j’ai assisté dans ma vie. Non seulement personne ne peut vraiment prédire le résultat, mais surtout, la palette des Partis offerts anime la vitalité des débats (du moins, dans les réseaux sociaux). Effectivement, l’arrivée à maturité de Québec solidaire, la mutation de l’ADQ en la CAQ et le surgissement rafraichissant d’Option nationale amènent finalement notre conversation démocratique à un niveau supérieur. Si bien qu’en tant que «chalengeur» principal au pouvoir, le PQ est réellement talonné dans son argumentaire; tranquillement, mais sûrement, nous sortons psychologiquement du bipartisme stérile et de l’alternance automatique.
Mais nous avons beau compter plus de citoyens pour débattre intelligemment de politique au Québec, encore faudrait-il avoir les moyens d’appliquer notre volonté démocratique.
En ce sens, ma priorité politique sur la scène nationale est toujours la même et c’est évidemment l’indépendance du Québec. Or, comment dire, j’ai cette impression que notre destin se joue chaotiquement durant cette élection dramatique; cette élection où personne ne semble en contrôle, pas même les libéraux.
Alors, je vais essayer de faire ce qu’aucun chroniqueur politique professionnel ne semble avoir fait durant cette élection, c’est-à-dire regarder à moyen terme en dégageant quelques scénarios électoraux possibles…évidemment, analysés dans l’intérêt de mon angle indépendantiste.
Pronostic et Projection
Bien sûr, la perspective que le gouvernement Charest soit réélu à de quoi faire frémir la société civile, surtout en combinaison avec les quatre prochaines années que nous devons subir avec le gouvernement Harper à Ottawa. En ce sens, le soubresaut démocratique que nous vivons présentement, cette accalmie électorale, ne pourrait devenir qu’un vague souvenir. Car, dans cet éventuel contexte, la lutte se transposera assurément dans la rue. Ce sera alors littéralement une épreuve de résistance entre le peuple et les forces de l’ordre pour notre avenir en tant que société et nation.
Le plus triste pour notre débat démocratique, c’est que le seul spectre d’un quatrième mandat pour Jean Charest a de quoi faire voter les citoyens comme des automates. En effet, trêve de débat dirons les péquistes, il faut se débarrasser de Jean Charest en premier lieu, et comme dit si bien Francois Legault, après on verra.
Un scénario plus envisageable maintenant, le PQ gagne, mais minoritaire. Ici, à moins de l’extraordinaire scénario que QS ait la balance du pouvoir, il faudra concevoir l’idée que dans cette position, la CAQ aura le beau jeu. En effet, elle pourra former le gouvernement avec le Parti de son choix, ou nous replongera en élection. S’il semble inconcevable l’existence d’un gouvernement PQ-CAQ, le contraire me parait cependant logique d’autant plus que François Legault a déjà annoncé de lui-même cette possibilité en juin dernier.
En contrepartie, que ce soit par la formation d’un gouvernement CAQ-PLQ ou par celle d’un PQ minoritaire précipité en élection, ce scénario s’avérerait hautement instable pour le gouvernement pris dans cette situation… ce qui est loin d’être mauvais pour la réorganisation des forces souverainistes.
Effectivement, malgré l’accalmie estivale, le Printemps Érable est encore vif dans nos esprits. Non seulement la grève étudiante aura servi d’électrochoc en politisant d’un coup une génération entière, mais l’adoption de loi 78 aura carrément généré une crise sociale. Subséquemment, via les manifestations monstres à chaque 22 du mois additionnées à celles des casseroles dans les rues, le peuple est dorénavant plus mobilisé que jamais. Ici, comment dire qu’un certain chef péquiste pourrait parler des fameuses «conditions gagnantes» que nous attendions inconsciemment. Conséquemment, il faut saisir l’occasion historique pouvant propulser le mouvement de libération nationale.
Bref, en 2012 c’est la révolution au Québec
Du côté des partis politiques, l’inexorable croissance de Québec solidaire et Option nationale revitalisent l’implication des citoyens et génèrent des nouveaux espaces pour le militantisme. Or, si nous retombons en élection après une bonne performance électorale des ces deux partis, considérant que leurs machines électorales respectives seront encore mieux rodées, nous pouvons déduire qu’un scénario intéressant pourrait apparaître pour les forces progressistes.
Alors, un PQ minoritaire devra logiquement se trouver aussi un nouveau chef. En ce sens, laissez-moi vous dire que je souhaite ardemment l’élection de Jean-Francois Lisée à ce poste, ô combien déterminant sur notre avenir national.
Considérant donc que notre plus grand atout présentement est le contexte d’ébullition sociale qui prévaut, je crains qu’un éventuel gouvernement péquiste majoritaire éteigne les braises de la révolution politique tant espérée. En effet, la première action du PQ sera logiquement d’apaiser les tensions en indexant les frais d’études universitaires. Si c’est ce qu’il y a de plus socialement responsable à faire, j’en conviens, le mouvement de contestation risque cependant de s’essouffler… voire de s’éteindre.
Puis, étant donné que la gouvernance souverainiste implique de ne pas avoir d’agenda précis quant au processus de souveraineté, il est fort à parier que le PQ majoritaire de Pauline Marois se contentera de gouverner la province durant son mandat. Et puisque le PQ Marois considère les souverainistes non-péquistes comme des adversaires électoraux à combattre (belle dynamique aliénante), elle ne réformera pas non plus le mode de scrutin afin de maintenir son monopole sur la souveraineté, ce moteur pour faire le plein de votes souverainistes. Pendant qu’elle combattra les progressistes et autres «caribous» trop pressés d’avoir un pays, les forces fédéralistes aidées de leurs médias se seront reconstituées dans l’opposition. Bref, le PQ Marois au pouvoir, si ce n’est pas la corruption libérale, cela demeure pour moi le statu quo.
En conclusion, cette élection est vraiment une boite à surprises. Vivement un peu de chaos pour nous sortir du Canada de Stephen Harper.
C’était notre devoir de s’unir. Nous avons manqué à ce devoir, fuis cette responsabilité, réfugié dans nos corporatismes politiques respectifs, pris le rendez-vous historique que nous avions devant nous à la légère. Aujourd’hui, si nos adversaires utilisent cette désunion pour tenter de se hisser ou se maintenir au pouvoir, ce ne sera par notre seule faute!»
-Jocelyn Desjardins