Historique des articles sur Amir Khadir depuis son élection
L’ex-ministre Robert Perreault appuie Amir Khadir
Publié le 03 décembre 2008 à 07h33 | Mis à jour le 03 décembre 2008 à 10h07
Denis Lessard La Presse |
(Québec) L’ex-ministre péquiste Robert Perreault souhaite l’élection du candidat de Québec solidaire, Amir Khadir, dans Mercier, le 8 décembre. Le Parti québécois «s’en va nulle part», affirme l’ancien député de Mercier sous Jacques Parizeau et Lucien Bouchard.
«Le PQ a fait une erreur fondamentale dans son analyse. Le projet d’indépendance est un plus plutôt qu’un moins. Or les dirigeants actuels du PQ ont fait le calcul que c’était un moins, un boulet…» regrette M. Perreault, joint hier au Conseil de l’environnement de Montréal.
Toujours au centre de nombreux réseaux chez les environnementalistes, Robert Perreault peut apporter des munitions au candidat de Québec solidaire qui était passé à 1100 voix de battre le péquiste Daniel Turp en 2007. Les verts ont mis une sourdine à leur campagne dans Mercier, les adéquistes y sont totalement absents. Ces deux partis avaient récolté près de 5000 voix, susceptibles de brouiller les cartes dans l’ancienne circonscription de Robert Bourassa et de Gérald Godin.
«Le PQ s’est laissé convaincre, contre toute logique politique, de mettre sous le boisseau l’essence même de son programme, ce qui en a toujours fait la force (…) la promotion au quotidien de la souveraineté du Québec», ajoute M. Perreault dans une lettre publique.
«Le PQ fait une grave erreur en mettant de côté son option. Cela ne donne pas plus le pouvoir, cela démobilise les militants… Je connais Pauline Marois depuis des années, je n’ai pas d’agressivité à son endroit, mais je pense que le PQ s’en va dans un cul-de-sac», observe-t-il toujours convaincu que la souveraineté du Québec est nécessaire.
«C’est particulier à dire, mais mon parti demeure le Parti québécois. Si la souveraineté du Québec se réalise un jour, c’est difficile d’imaginer que cela puisse se faire sans lui», note-t-il.
«On peut toujours rire des gens du Plateau-Mont-Royal, mais il y a ici 100 000 personnes, qui ont leurs valeurs, leurs aspirations… et Amir Khadir en est le porteur», résume-t-il. C’est le candidat Khadir qui a sollicité l’appui de l’ancien ministre.
Selon M. Perreault, «Amir Khadir peut apporter de la fraîcheur à l’Assemblée nationale. Rebrasser des cartes et apporter de l’air frais. Je n’ai rien contre Daniel Turp (le député péquiste sortant) mais Amir Khadir apporte des idées dans une Assemblée nationale sclérosée. Il est porteur de valeurs qui sont proches de nos enfants. C’est un appel d’air souhaitable», dit-il en entrevue.
Le candidat de Québec solidaire «est un partisan convaincu de l’indépendance du Québec; pour lui ,ce projet s’enracine à gauche», observe Robert Perreault.
Joint hier, le candidat de Québec solidaire a souligné que d’autres militants péquistes en vue appuyaient sa candidature, Dominique Ollivier, candidate au PQ et au Bloc, Michel Pauzé et Pierre Boileau, longtemps associés au PQ.
«Nos pointages nous indiquent qu’on est en avance, soulignait hier M. Khadir. L’appui de M. Perrreault s’ajoute à une série… Dan Bigras, Richard Desjardins ont aussi appuyé Québec solidaire dans Mercier». Il peut aussi compter sur l’appui de Sylvain Valiquette, le candidat du Parti vert qui lui avait fait la lutte en 2007. M. Valiquette est maintenant le candidat des verts dans Rosemont.
«Je suis sympathique à Amir Khadir. Il a sa chance maintenant. Il est mieux d’en profiter. Il y a un pacte de non-agression avec Québec solidaire. Amir Khadir et Guy Rainville (le chef des verts) se sont parlé, et se sont entendus», explique M. Valiquette.
En 2007, le péquiste Daniel Turp l’avait emporté par 1100 voix sur Amir Khadir. Cette fois, la candidate libérale, une employée politique de Michelle Courchesne, fait une campagne modeste. En 2007, Sylvain Valiquette avait obtenu 2400 voix, quelques voix de plus que le candidat adéquiste Gabriel Tupula Yamba.
Mercier, la rebelle
Publié le 06 décembre 2008 à 08h45 | Mis à jour le 06 décembre 2008 à 08h46
Michèle Ouimet La Presse |
Il m’est arrivé un drôle de truc la semaine dernière. Un bénévole qui travaille pour le péquiste Daniel Turp, dans Mercier, a appelé chez moi. Il faisait du pointage, histoire de vérifier si son candidat est en avance.
Je vous résume la conversation.
– Comment va votre pointage?
– Pas très bien, soupire le bénévole. Daniel Turp va perdre contre Amir Khadir.
– Vous pensez que Québec solidaire va gagner?
– Ouais, c’est parti pour ça.
– Êtes-vous certain que vous travaillez pour le Parti québécois?
Il faut dire que Mercier est une drôle de circonscription. Imprévisible, rebelle, le genre qui aime donner des leçons aux politiciens. En 1976, les électeurs ont élu le poète Gérald Godin, envoyant au tapis le premier ministre Robert Bourassa.
Mercier, plantée au coeur de la «république» du Plateau Mont-Royal, s’est transformée en fief du Parti québécois. Mais en 2001, dans un sursaut d’humeur, les électeurs ont chassé le péquiste Claudel Toussaint pour le remplacer par Nathalie Rochefort, la libérale aux cheveux rouges. Une rebelle pour une circonscription rebelle. Humiliante défaite pour le PQ.
En 2003, les péquistes ont repris Mercier. Daniel Turp l’a emporté avec une confortable majorité.
En 2007, nouveau coup de théâtre, le candidat de Québec solidaire, Amir Khadir, talonne Daniel Turp qui l’emporte par seulement 1100 voix.
Si Québec solidaire a une chance d’élire un député lundi, ce sera dans Mercier. Amir Khadir le sait et il met le paquet. Je l’ai rencontré dans un restaurant du Plateau cette semaine. Il est arrivé en retard, sourire enjôleur, allure décontractée avec son col roulé, son foulard noué négligemment autour du cou et ses cheveux noirs en bataille. Sûr de lui.
Les gens le reconnaissent, lui serrent la main, lui souhaitent bonne chance. Il est en terrain conquis dans ce restaurant plus granole que les soeurs McGarrigle.
Amir Khadir ne doute de rien.
Le jour où on va prendre le pouvoir…
Vous pensez que vous allez prendre le pouvoir?
Oui, madame!
Amir Khadir est un militant dans l’âme. C’est de famille, soutient-il. «Mon père était un dissident, il s’est opposé au shah et aux ayatollahs.»
Il a quitté l’Iran à l’âge de 10 ans. Ses parents, des enseignants, ont vécu la dure réalité des immigrants. Son père est devenu chauffeur de taxi et sa mère a fait du ménage dans des hôtels.
Lui, le fils d’immigrant, a étudié en médecine.
Amir Khadir se voit déjà assis dans son fauteuil de député à l’Assemblée nationale. Il a même préparé un discours de prestation de serment. Il veut citer un poème de Gérald Godin: «T’en souviens-tu, Godin, astheure que t’es député, t’en souviens-tu, de l’homme qui frissonne, qui attend l’autobus du petit matin après son shift de nuit…»
Il a aussi choisi les photos qui décoreront son bureau. Elles tapissent les murs de son local électoral. Sur l’une d’elles, des grévistes brandissent une pancarte. On peut y lire: Du pain debout plutôt que du steak à genoux.
Amir Khadir parle avec respect de son adversaire, Daniel Turp. «On se connaît. Je lui ai déjà donné un lift, il n’a pas d’auto. C’est un progressiste, un homme bien. Il a signé le manifeste des solidaires. S’il perd, il ne sera pas si mécontent que ça.»
Daniel Turp proteste gentiment. Lui aussi aime bien Amir Khadir, mais de là à lui concéder la victoire, non!
Et c’est vrai qu’il n’a pas d’auto. Il a conclu un pacte avec son cousin. Ils se sont juré de ne jamais acheter de voiture pour «aider la planète». Il avait 18 ans. Il a tenu promesse. À 53 ans, il n’a toujours pas de permis de conduire.
Daniel Turp est constitutionnaliste, une profession très en vogue par les temps qui courent. Il a fait de gros efforts pour se débarrasser de son image d’intellectuel hautain. Il a renoncé à ses noeuds papillon avec un soupçon de regret.
«On m’a dit que ça me donnait l’air d’un intellectuel débranché, loin du vrai monde. Pauline a ses bijoux, moi, mes noeuds papillon.»
Pourtant, il a connu une enfance modeste. Il a grandi à Verdun et son père était vendeur de tuyaux.
Khadir a le vent dans les voiles. Les verts mènent une campagne «tranquille», ils lui laissent le terrain libre, et Robert Perreault, ex-ministre péquiste et ancien député de Mercier, a décidé de laisser tomber le PQ pour appuyer Khadir.
Daniel Turp fait la moue. «Depuis 2001, Robert n’a pas de bons mots pour nous.»
Daniel Turp arpente les rues de Mercier et salue ses électeurs. Poli, courtois. Il fait le tour des commerces pour vérifier s’il n’y a pas d’affiches en anglais. Dans la rue, il croise le bouillant cinéaste Pierre Falardeau, un drapeau du Québec collé sur sa tuque.
Pierre Falardeau me regarde d’un air mauvais. La Presse? «Vous avez parlé de la maison de Mme Marois, mais vous n’avez rien écrit sur celle de Jean Charest!» crache-t-il. Il part en coup de vent. La rencontre a duré 30 secondes.
«En 2007, il m’a donné un coup de main», précise Daniel Turp.
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La candidate libérale, Catherine Émond, est discrète. Elle a travaillé quelques mois pour la ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne. C’est la première fois qu’elle se présente dans une circonscription. Et elle est tombée sur Mercier.
«Mme Courchesne m’a demandé de bien la traiter», lance Daniel Turp en riant.
Catherine Émond s’est levée aux aurores pour distribuer des dépliants dans l’entrée du métro balayée par des courants d’air. Il pleut, les gens sont maussades. Elle n’ose pas leur fourguer son dépliant. Elle murmure un bonjour timide d’une voix flûtée.
«On reçoit beaucoup d’amour pendant une campagne électorale», dit-elle.
Ce matin-là, à la station Laurier, l’amour n’était pas au rendez-vous.
Pendant que Khadir, Turp et Émond ratissent la circonscription, flirtent avec les électeurs au petit matin et courent les bingos et les restaurants, la candidate de l’ADQ, Élisa Fortin-Toutant, 22 ans, est invisible.
«Elle n’a pas le temps de vous rencontrer, elle se concentre sur sa campagne qui est très terrain», m’assure la relationniste de l’ADQ.
Quel terrain? Celui de l’université où elle étudie en éducation physique ou celui du centre de gym où elle travaille?
Elle n’a pas de local électoral et ses adversaires ne la voient jamais. L’ADQ a des croûtes à manger. Il en faut plus pour séduire une circonscription aussi rebelle que Mercier.
RÉSULTATS EN 2007 DANS MERCIER
Daniel Turp, PQ 33,35%
Amir Khadir, QS 29,38%
Nathalie Rochefort, PLQ 19,82%
Sylvain Valiquette, Parti vert 8,48%
Gabriel Tupula Yamba, ADQ 8,42%
Québec solidaire promet d’écrire une page d’histoire
Publié le 08 décembre 2008 à 06h40 | Mis à jour le 08 décembre 2008 à 10h09
Violaine Ballivy La Presse |
Québec solidaire se targue de présenter des candidats dans la quasi-totalité des 125 circonscriptions de la province, mais ne nourrit de véritables ambitions que pour deux d’entre elles: celles de ses deux porte-parole, Françoise David et Amir Khadir. Respirant une confiance sans faille, ils promettent d’écrire une page d’histoire aujourd’hui.
Québec solidaire (QS) a mis toute la gomme au cours des 33 derniers jours dans les circonscriptions montréalaises de Mercier et de Gouin, convoitées par Amir Khadir et Françoise David. Cette dernière ne craint pas les répercussions de cette stratégie sur les candidats disséminés ailleurs dans la province. «Au contraire, cela a un effet de contagion si les gens croient qu’au moins deux candidats solidaires ont des chances d’être élus. Cela nourrit l’espoir», dit-elle, bien qu’elle prévoie du même souffle des résultats «modestes» dans plusieurs régions.
QS admet que son défi aurait été moins grand à relever si le Parti vert avait acquiescé à sa demande de lui laisser le champ libre dans ces deux circonscriptions, comme il l’a lui-même fait dans Notre-Dame-de-Grâce. Amir Khadir est passé à 1100 voix de faire son entrée à l’Assemblée nationale en 2007, et Françoise David, à 3400 voix. «Nous avons assis notre crédibilité depuis», a insisté avec aplomb Amir Khadir lors d’un point de presse, hier. Le médecin est même allé jusqu’à soutenir que plusieurs de ses adversaires estiment que son parti possède la meilleure des plateformes. QS a reçu l’appui ces derniers jours de plusieurs personnalités publiques associées au mouvement écologiste.
Un vote contre l’ADQ
Québec solidaire accuse les trois grandes formations politiques d’avoir mené une campagne ennuyante et prévisible, mais il est particulièrement sévère envers le parti de Mario Dumont. Les élections n’auront pas été vaines si l’ADQ perd des plumes aujourd’hui, a laissé entendre M. Khadir. «L’Action démocratique, à qui beaucoup de Québécois avaient fait confiance lors du dernier scrutin, va, nous l’espérons, recevoir une sanction claire pour ses idées rétrogrades et l’incompétence de son équipe.»
Le dernier sondage CROP publié par La Presse créditait QS de 5% des intentions de vote. En 2007, le parti avait recueilli 3,65% des votes exprimés. Aucun député solidaire n’a jamais été élu.
Amir élu, Françoise battue
Publié le 08 décembre 2008 à 22h00 | Mis à jour le 08 décembre 2008 à 22h03
Pierre Foglia La Presse |
Bonsoir Québec! Bonsoir Mercier! Bonsoir Gouin! Bonsoir et merci à tous ceux qui ont rendu ceci possible! Merci pour cette raison d’espérer un autre Québec!
Amir Khadir était lancé.
Ses premiers mots de député.
Une économie au service des gens!
Un système de santé gratuit.
Un Québec où les jeunes n’auront pas à s’endetter pour étudier. Une pause. Et puis il demande à la foule la permission de sortir de son texte, juste 30 secondes, dit-il, juste le temps de réciter la chanson de Claude Dubois Comme des millions de gens…
Du Amir tout craché. Du grand Amir? Il est toujours comme ça. Ils vont en avoir plein les bras à Québec. Ils ne se doutent pas à quel point. Ils ne se doutent combien ce type est tenace. Intelligent. Ils ne se doutent pas de ce qu’un homme tout seul comme celui-là peut faire.
Qu’est-ce que tu vas faire à Québec, Amir?
Cette question! Il sera le bras politique de la gauche. Il sera la voix de tous ceux qui n’en ont pas. Y compris des verts. Y compris de ceux qui ne croient plus.
Et de remercier Françoise David et toutes ces femmes qui les premières ont évoqué (au lendemain de la Marche des roses en 2000) la nécessité d’une alternative, d’autre chose.
Et même de remercier Daniel Turp, le candidat péquiste dans Mercier, qu’il venait de battre, «Daniel, mon ami, qui partage bien des idées de Québec solidaire».
Battu par 1123 voix en 2007 par Daniel Turp, justement, Amir Khadir n’a cessé de «travailler» son comté depuis sa défaite, menant une campagne très intense en terrain connu puisque c’est la troisième fois qu’il se présente dans Mercier, où il avait déjà été candidat en 2003 sous les couleurs de l’Union des forces progressistes (UFP).
C’était la surprise la plus attendue de cette élection, la plus espérée aussi à gauche mais pas seulement à gauche. M. Khadir a reçu l’appui de l’ancien ministre péquiste Robert Perreault ; de Claude Béland, l’ex-président du mouvement Desjardins; même la militante écologiste Laure Waridel serait intervenue auprès du candidat vert dans Mercier en lui demandant, en début de campagne, de faire un geste «écologiste» en se recyclant lui-même (ou à peu près).
M. Khadir a-t-il bénéficié du vote stratégique des libéraux qui ont voulu faire battre Turp? Rien d’impossible dans Mercier, qui a déjà été assez fantasque pour préférer l’éditeur-poète Gérald Godin au premier ministre Robert Bourassa et, alors que les péquistes le pensaient acquis, pour élire une libérale inorthodoxe (Nathalie Rochefort), avant de revenir au PQ avec Daniel Turp.
Et maintenant Amir Khadir, de loin, l’élu le plus à gauche qu’on aura dans cette partie-ci de l’hémisphère nord… depuis Gérald Godin dans Mercier justement.
Arrivé au pays à l’âge de 10 ans avec des parents francophiles qui fuyaient le schah, à 15 ans il rencontre René Lévesque et devient souverainiste. Il voulait devenir physicien et… poète; il est poète et spécialiste en microbiologie-infectiologie à Pierre-Le Gardeur, où il est d’ailleurs de service ce matin et pour la prochaine semaine. Pour rendre à ses collègues, notamment les docteurs Maziade et Murray, un peu de la couverture qu’ils ont assurée pour lui permettre de mener sa campagne.
Quitter la médecine ne sera pas un deuil si facile ; M. Khadir pense, espère pouvoir pratiquer encore une journée par 15 jours pour garder «la main».
Les nouvelles étaient moins réjouissantes pour l’autre tête de Québec solidaire, Françoise David, défaite dans Gouin par le péquiste Nicolas Girard. Défaite crève-coeur pour cette femme de coeur, justement, qui a mené une campagne très intense dans une circonscription foncièrement péquiste. «Ce n’est pas un candidat que j’ai à battre, c’est un parti», confiait-elle, dans les derniers jours de sa campagne.
Amir Khadir député, il est à prévoir que Mme David prendra seule la présidence de Québec solidaire qui, à 4%, a fait légèrement mieux qu’en 2007.
Les deux têtes de Québec solidaire
Publié le 10 décembre 2008 à 08h43 | Mis à jour le 10 décembre 2008 à 08h45
Michèle Ouimet La Presse |
Il arrive au restaurant les yeux barbouillés de sommeil, secoué par une mauvaise toux. La veille, il a dansé la salsa jusqu’à 4h du matin pour fêter sa victoire. Il est 8h15. Il a dormi à peine trois heures.
Amir Khadir a été élu dans Mercier, une circonscription qui englobe le Plateau-Mont-Royal. Une première. Jamais un candidat d’un parti de gauche n’a été élu au Québec. Pas la gauche édulcorée du Parti québécois. Non, la vraie gauche, celle qui dénonce les grosses compagnies sans faire dans la dentelle, une gauche écologiste, féministe, pacifiste, souverainiste.
Amir Khadir n’a pas eu le temps de lire les journaux. Il ne connaît même pas sa majorité.
«872 voix? Pas mal», dit-il d’une voix éraillée.
Pas moyen de lui poser une question sans que son cellulaire sonne. Il est assailli par les journalistes. Son adjointe, aussi, est pendue au téléphone. Elle noircit une feuille de papier où s’alignent des dizaines de demandes d’entrevues.
– Tu veux quelque chose, lui demande-t-elle.
– Un café, répond-il. Fort.
Amir Khadir est fébrile, il ne tient pas en place. Il met son foulard, l’enlève, se lève, s’assoit, feuillette les journaux qui traînent sur la table, parle, gesticule, s’enflamme, cherche des 25 cents dans le fond de sa poche pour les glisser dans le téléphone public où il donne ses entrevues.
– Mais qu’est-ce qu’il a écrit Foglia? me demande-t-il. Tout le monde me parle de lui.
– Qu’ils vont en avoir plein les bras avec vous à Québec.
Amir Khadir n’est pas reposant. «Je suis un peu débridé, admet-il. Je fais deux-trois choses en même temps, je fatigue les gens. C’est vrai que j’en fais beaucoup. Je déplace plus d’air que de réalité.»
«Il est hyperactif, très sûr de lui. Il fonce, raconte Françoise David, son alter ego. À l’Assemblée nationale, ils ne savent pas ce qui les attend. Moi, je le sais!»
Amir Khadir a un horaire de fou. Il doit passer la journée à l’hôpital Le Gardeur, à Lachenaie, où il est de garde jusqu’à 17h. Il est «infectiologue». Il file ensuite à Montréal, dans sa maison cossue de la rue Saint-Hubert, au coeur du Plateau, pour s’occuper «des affaires ordinaires».
Il quitte le café, son adjointe sur les talons. Il déblaie sa voiture avec une mitaine, il n’a pas de balai. Il conduit vite au milieu de la tempête.
À l’hôpital, il ne peut pas faire deux pas sans qu’un collègue lui donne une tape dans le dos, l’embrasse ou le félicite. Il s’enferme dans son bureau minuscule et en désordre. Il discute avec le Dr Maziade qui a tenu le fort pendant qu’il écumait Mercier. Au mur, des dessins de ses enfants et une photo de Che Guevara.
Sa femme est en Afrique, sa belle-mère lui donne un coup de main. Elle s’occupe de la maison et des trois filles âgées de 8 à 17 ans. «Elle le fait par amour pour ses petits-enfants et par pitié pour moi», dit-il en riant.
Il n’a aucune idée du boulot qu’il l’attend. Qu’est-ce qu’un député fait au lendemain de son élection? Il l’ignore. En attendant, il va passer la semaine à l’hôpital. Et donner des entrevues.
13h. Françoise David pousse la porte du restaurant et se dirige vers ma table d’un pas décidé. Elle s’est couchée à 2h du matin. Contrairement à son «co-porte-parole», elle n’a pas dansé jusqu’à l’aube.
«Êtes-vous fous!» a-t-elle répondu aux militants lorsqu’ils lui ont demandé si elle voulait les accompagner pour continuer la fête.
Le tourbillon autour d’Amir Khadir contraste avec le calme qui entoure Françoise David.
Québec solidaire a une direction bicéphale. En font foi les affiches électorales à deux têtes. Avec l’élection d’Amir Khadir, Françoise David se retrouve un peu orpheline. La vedette, c’est Khadir. C’est après lui que les journalistes courent. Françoise David accuse le coup.
Est-ce que la direction bicéphale va tenir le coup?
«Oui, jure Amir Khadir, même si les gens nous traitent de pelleteux de nuages.»
Françoise David nuance. «Pour l’instant, oui. Est-ce que je vais trouver ma place? Je n’ai pas de réponse. C’est pas vrai que je vais rester dans le garde-robe.»
Elle a rencontré Amir Khadir en 2000. Elle connaît ses coups de gueule, son franc-parler, son langage coloré et musclé. Risque-t-elle d’éteindre les feux qu’il allumera avec des déclarations incendiaires ou maladroites?
«Pas question de jouer aux pompiers pendant quatre ans», tranche-t-elle.
Lorsqu’elle s’est levée hier matin, elle s’est sentie fatiguée. Sa défaite dans Gouin lui est rentrée dans le corps. «J’ai traîné longtemps en jaquette, dit-elle. Je me suis dit: Bon, il se passe quoi dans ma vie?»
Puis le téléphone a sonné. D’abord timidement. Une demande d’entrevue, puis une deuxième. À 14h30, elle en avait neuf. Loin des dizaines d’Amir Khadir, mais assez pour calmer l’angoisse du vide.
Elle n’a pas une victoire pour remplir le vide. Elle le sait. Elle est prête à l’affronter. Jusqu’à la prochaine bataille.
Pour joindre notre chroniqueuse: michele.ouimet@lapresse.ca
Khadir: une première ou un accident?
Publié le 10 décembre 2008 à 08h52 | Mis à jour le 10 décembre 2008 à 08h53
Charles Côté La Presse |
Amir Khadir est le premier candidat de gauche élu sous une bannière de gauche. Mais ce n’est pas la première fois qu’une personne appartenant à la gauche plus radicale fait son entrée à l’Assemblée nationale, selon des experts consultés par La Presse.
«À part l’élection d’un communiste au fédéral dans l’après-guerre, c’est la première fois qu’un candidat clairement de gauche qui défend des idées clairement de gauche est élu, dit Jean-Marc Piotte, professeur émérite du département de science politique de l’UQAM. C’est sans précédent dans les élections québécoises.»
Mais au-delà de l’étiquette, l’Assemblée nationale a eu sa part de militants communautaires ou de syndicalistes, selon Alain-G. Gagnon, professeur au même département et détenteur de la Chaire de recherche du Canada en études québécoises et canadiennes.
«À l’intérieur même du Parti québécois, il y a toujours eu une aile gauche très forte, mais une fois au pouvoir ils ont dû faire des concessions, dit M. Gagnon. Michel Bourdon, on ne peut pas être plus à gauche que lui. Et tout le monde connaît les différends que Louise Harel a eus avec René Lévesque.»
M. Gagnon pense par ailleurs que la circonscription de Mercier offre «un contexte tout à fait unique». «Mais je suis loin d’être sûr que l’arrivée de M. Khadir à Québec va faire un changement majeur. Il va se retrouver tout seul, sans ressources financières.»
M. Piotte n’est pas d’accord. «Son élection aura un impact sur tout le Québec», dit-il.
Françoise David, pour sa part ressent déjà «l’effet» Khadir. «On voit déjà toute la visibilité que ça apporte à Québec solidaire, dit-elle. On est convaincu qu’il va faire un très bon député.»
Khadir sur les traces de Mario Dumont?
Ironiquement, Amir Khadir va peut-être invoquer le précédent établi par Mario Dumont, qui a siégé comme seul représentant de son parti. En 1994, M. Dumont avait obtenu un budget de recherche de 67 500$, soit six fois plus que les 11 000$ alloués normalement à tous les députés.
Deux ans plus tard, le député libéral Pierre Paradis avait exigé que ce budget lui soit retiré, en accusant M. Dumont de l’avoir obtenu en échange de sa participation à la campagne référendaire de 1995 dans le camp du Oui. M. Paradis avait dû retirer ses propos par la suite.
À l’époque, M. Dumont pouvait plaider qu’il avait obtenu 250 000 votes et 10% des suffrages. Québec solidaire a fait deux fois moins: 123 000 votes et 3,8%.
À la base, M. Khadir devrait pouvoir partager avec un ou deux autres députés les services d’une secrétaire à l’Assemblée nationale. Il pourra aussi embaucher du personnel dans son bureau de circonscription. Au-delà de ces moyens de base, tout est renégocié au début de la législature, explique-t-on à l’Assemblée nationale.
M. Dumont s’était également battu pour obtenir plus de temps de parole à l’Assemblée nationale.
Ce n’était pas un accident…
Publié le 18 décembre 2008 à 07h18 | Mis à jour le 18 décembre 2008 à 07h26
Il fallait s’y attendre. À peine les résultats proclamés que de savants analystes, les mêmes qui ne prévoyaient qu’une seule chaude lutte à Montréal (Crémazie), nous fournissent leurs explications en trompe-l’oeil.
La victoire d’Amir Khadir, cette surprise, serait un accident attribuable entre autres à la faiblesse du taux de participation, voire un épiphénomène propre à cette étrange sociologie du Plateau Mont-Royal. Après le mystère conservateur de Québec, nous voilà doté d’un autre gadget du prêt-à-penser: l’unicité des étranges habitants de la non moins bizarre république de Mercier.
Certes, cette circonscription possède sa sociologie propre. Plus jeune et très nettement plus scolarisée que la moyenne nationale, la population de Mercier présente toutefois un revenu médian qui n’est que très légèrement supérieur à la moyenne, tout en présentant néanmoins d’importants secteurs de pauvreté. S’il est exact d’affirmer que cette circonscription compte un grand nombre de travailleurs de la culture, plusieurs s’empressent de conclure au caractère radicalement atypique de cette population et de l’étrangeté de son vote. Comme une façon subtile de délégitimer un choix. «Vous savez… les artistes, ces pelleteux de nuages…»
Par ailleurs, la thèse de l’accident purement circonstanciel ne tient pas la route lorsqu’on examine les résultats de cette circonscription depuis le score remarquable de Paul Cliche, en avril 2001, coalisant l’ensemble des forces de gauche et préfigurant son unification en voie de réalisation. On peut même remonter au score du minuscule mais courageux PDS, en 1998, pour constater le net enracinement des valeurs et des thèses de la gauche souverainiste dans cette circonscription au fil des scrutins. Ce vote est d’abord un vote d’adhésion aux valeurs de Québec solidaire.
Voter pour le bon docteur?
D’autres attribuent l’essentiel du résultat au seul succès personnel du candidat. On louange ses indiscutables qualités de communicateur politique, son aura professionnel, son charisme, etc. Nul doute que tout cela a influé sur le résultat mais n’est-ce pas une autre façon de discréditer une victoire que de la personnaliser à outrance? Bref, s’il y a un certain vote d’estime autour de la candidature de M. Khadir, il faut se garder d’en exagérer l’importance. Ce type d’analyse, très people, passe à la trappe les progressions enregistrées par d’autres candidatures, dont celle de Françoise David, la coporte-parole de Québec solidaire dans un contexte beaucoup plus difficile. Cette vision glamour de la politique ignore également l’importance du travail de terrain où les candidats, enracinés dans leur milieu, tendent l’oreille aux préoccupations concrètes des gens et se font leur porte-parole. Qui a relevé qu’Amir réclamait plus de médecins pour le CLSC de son quartier? Comme professionnel de la santé, Amir s’est fait surtout connaître pour la farouche opposition de son parti à la privatisation du secteur de la santé. (…)
S’il faut accoler une étiquette à la victoire de Québec solidaire, c’est bien celle de la pugnacité des équipes militantes qui ont su labourer au bon endroit et en profondeur depuis une dizaine d’années. Cette victoire c’est d’abord la leur et ils sauront bien trouver le moyen de transformer cette circonscription en véritable bastion de la gauche. Non pour s’y enfermer, mais pour rayonner et essaimer afin de contribuer à créer deux, trois plusieurs Mercier. C’est ainsi que l’accidentel épiphénomène apparaîtra pour ce qu’il est vraiment: un premier signe avant-coureur d’une montée de la gauche politique en cette période de crise du néolibéralisme et de ses douloureuses recettes.
Josée Vannasse Et François Cyr
Les auteurs sont membres de Québec solidaire et étaient codirecteurs de la campagne d’Amir Khadir dans Mercier.
Et lance la chaussure!
Publié le 21 décembre 2008 à 07h38 | Mis à jour le 21 décembre 2008 à 07h42
Violaine Ballivy La Presse |
Le vent de sympathie à l’endroit du journaliste irakien qui a lancé ses chaussures à la tête du président Bush, dimanche dernier, souffle de plus en plus fort, et de plus en plus loin. Il a même atteint le Canada.
Hier, des manifestants ont bravé le froid et se sont massés devant les consulats des États-Unis de Montréal et de Toronto, munis de souliers, de bottes et de sandales qu’ils ont jetés contre une photo en noir et blanc du président américain.
«Ça ne changera probablement rien, mais ça fait du bien», a dit Christina Blais, la première à s’élancer, à Montréal, en criant «kalb» – chien, en arabe, a-t-elle expliqué. «C’est la pire des insultes.»
Le député fraîchement élu de Québec solidaire, Amir Khadir, s’est aussi prêté au jeu. «Il y a certainement des milliers d’élus dans le monde qui rêveraient d’avoir l’occasion de faire ce que j’ai fait», a-t-il dit. Il a tout de même indiqué qu’il n’aurait pas osé devant un Bush en chair et en os.
La poignée de manifestants a ensuite pris le chemin du centre de recrutement des Forces armées canadiennes, le temps d’un deuxième lancer du soulier contre une effigie de Stephen Harper pour protester contre «la complicité du Canada dans la sanglante guerre au terrorisme des États-Unis», a expliqué le militant bien connu Jaggi Singh.
La détention du journaliste irakien Mountazer al-Zaïdi, nouveau héros du monde arabe, a aussi suscité des rassemblements en Jordanie et en Turquie. Le chef de la diplomatie malaisienne a pour sa part estimé que le geste du journaliste était «la meilleure manifestation de représailles» à la suite de l’invasion américaine de l’Irak.
M. al-Zaïdi fera probablement face à des accusations d’insulte à un chef d’État étranger en visite, accusations qui pourraient lui occasionner une peine de prison de deux ans. Selon le juge d’instruction irakien chargé de l’affaire, M. al-Zaïdi a été frappé depuis son arrivée en prison; il a des contusions au visage et autour des yeux.
Avec Associated Press et Agence France-Presse
Annus horribilis pour l’ADQ, consécration pour Québec solidaire
Publié le 23 décembre 2008 à 12h15 | Mis à jour le 23 décembre 2008 à 15h21
Martin Ouellet La Presse Canadienne Québec |
Annus horribilis. Aucune expression ne décrit avec plus d’éloquence l’année d’enfer qu’a connue l’Action démocratique du Québec en 2008. La formation de centre-droit a perdu tour à tour sa crédibilité, ses supporters puis son chef.
De l’autre côté de l’échiquier, Québec solidaire, véhicule de la gauche, la vraie, celle de l’intervention massive de l’État dans les affaires sociales, est sorti des limbes en 2008 avec l’élection de son premier député.Mais Amir Khadir, l’une des deux têtes dirigeantes du parti avec Françoise David, n’est pas uniquement le porte-parole de la classe laborieuse. Il est aussi le second leader politique souverainiste de l’Assemblée nationale aux côtés de la péquiste Pauline Marois.
Vent de droite, vent de gauche, le parlement québécois a senti les brises de l’un et l’autre au cours de la dernière année.
L’élection du 8 décembre 2008 a bouleversé la dynamique héritée du précédent scrutin tenu à peine 20 mois plus tôt.
Invoquant la «tempête économique» à venir, le premier ministre Jean Charest a déclenché une élection précipitée qui allait le libérer des entraves de la cohabitation minoritaire, en plus de sceller le sort de l’ADQ comme opposition officielle et gouvernement en devenir.
Malgré une remarquable poussée du Parti québécois en fin de course, le chef libéral est parvenu à faire élire tout juste assez de députés pour former un gouvernement majoritaire, avec toutes les coudées franches pour imposer son ordre du jour.
Dans ce scrutin de fin d’année, l’ADQ a perdu 34 députés, ce qui constitue une hécatombe pour un parti qui avait failli prendre le pouvoir 20 mois plus tôt.
Mais en même temps, la catastrophe était annoncée depuis des mois, à mesure que les difficultés du parti à s’imposer comme opposition officielle devenaient de plus en plus manifestes.
À l’issue du scrutin, Mario Dumont s’est retrouvé à la tête d’un parti exsangue, avec seulement six députés pour l’épauler. Pour le chef de l’ADQ, ce retour à la case départ a sonné la fin des haricots. Après 14 ans de hauts et de bas à l’Assemblée nationale, Mario Dumont a jugé que le temps était venu de passer à autre chose.
L’Action démocratique va-t-elle survivre au départ de son fondateur et chef charismatique? Rien n’est sûr, mais certains voyaient déjà le député Éric Caire reprendre la barre du vaisseau. Dans ce contexte, les prochaines années s’annoncent comme une longue et pénible traversée du désert pour les députés de l’ADQ. Certains pourraient être tentés de chercher refuge ailleurs, comme l’avaient fait deux d’entre eux peu avant la dernière campagne électorale. Ces transfuges croyaient améliorer leur chance de réélection chez les libéraux, mais ils ont tous deux été battus sans équivoque et sont retournés dans l’ombre.
Du côté du Parti québécois, la chef Pauline Marois a renforcé considérablement son leadership en 2008 et amorcera la prochaine année en zone de confort.
Alors que nombre d’observateurs doutaient de ses qualités de rassembleuse, Mme Marois est parvenue à faire élire 51 députés, avec une proportion des suffrages supérieure à ce qu’avaient obtenu ses prédécesseurs André Boisclair et Bernard Landry.
La leader péquiste aura cependant un défi considérable à relever dans les mois à venir: ranimer la flamme souverainiste sans souffler mot du calendrier référendaire.
Le petit dernier de l’Assemblée nationale, Amir Khadir, de Québec solidaire, retiendra beaucoup l’attention au cours de l’année qui vient. Aussitôt après avoir prêté serment à titre de député, M. Khadir, de la circonscription montréalaise de Mercier, a résumé le crédo de sa formation: faire payer les riches – les particuliers et la grande entreprise – pour accroître le niveau de vie des plus pauvres.
Il est hasardeux toutefois de prédire l’impact qu’aura le discours de Québec solidaire dans la société québécoise. Des analystes pensent qu’Amir Khadir, par sa fougue et ses interventions, forcera les autres partis à orienter leurs politiques un peu plus à gauche de l’échiquier. D’autres avancent cependant que l’influence de Québec solidaire fond comme peau de chagrin à mesure que l’on s’éloigne du Plateau Mont-Royal.
Amir Khadir défend son lancer de chaussures
Publié le 28 décembre 2008 à 19h30 | Mis à jour le 28 décembre 2008 à 19h35
La semaine dernière, devant le consulat des Etats-Unis à Montréal, le député de Mercier avait lancé des chaussures en direction d’une photographie de George W. Bush.
Photo: Bernard Brault, La Presse
La Presse Canadienne Montréal |
Le député de la circonscription de Mercier, et l’un des deux porte-parole de Québec solidaire, Amir Khadir, n’est pas étonné qu’une plainte ait été déposée à l’Assemblée nationale.
Déplorant la participation de M. Khadir à une manifestation contre le président des Etats-Unis, George W. Bush, un enseignant du Cégep de Sainte-Foy, Gilbert Gagnon, a décidé de porter plainte au président de l’Assemblée nationale du Québec.
La semaine dernière, devant le consulat des Etats-Unis à Montréal, le député de Mercier avait lancé des chaussures en direction d’une photographie du président américain, imitant ainsi un geste posé par un journaliste irakien.
Mais lors d’une entrevue avec La Presse Canadienne, Amir Khadir s’est défendu en affirmant qu’il n’aurait jamais posé un tel geste contre un «président qui avait le respect de son peuple».
M. Khadir affirme que «le peuple américain a honte de (George W. Bush)». Selon lui, ce président symbolise «le mensonge, la manipulation, la guerre, la destruction».
M. Khadir a affirmé qu’il s’en est pris à ces symboles, et non pas à la personne de George W. Bush.
«Si M. Bush, lui même, avait été là en personne, je ne lui aurais jamais lancé un soulier à la figure», a-t-il assuré.
Gilbert Gagnon estime que le geste posé par le député de Mercier n’est pas acceptable et qu’il encourage la violence. Selon lui, les agissements de M. Khadir constituent un manquement grave à la dignité et aux devoirs d’un député. Il a demandé à l’Assemblée nationale de prendre des mesures contre Amir Khadir.
Mais le député de Mercier croit qu’il fait honneur à la fois au poste de député et à l’Assemblée nationale.
Selon lui, il s’est simplement «élevé au rang d’un citoyen» en participant à la manifestation de la semaine dernière.
Il a en outre fait valoir qu’un député était le représentant des électeurs d’une circonscription, et qu’en choisissant un candidat de Québec solidaire, les électeurs de Mercier ont voulu exprimer une autre voix.
Il a tenu à rappeler qu’il participait aux mouvements antiguerre depuis plusieurs années.
«Il ne faut pas que (l’Assemblée nationale) devienne une prison pour quelqu’un comme moi, qui, depuis 30 ans, fait cela», a-t-il déclaré.
«Les gens de Mercier savent bien qui je suis», a-t-il conclu.
Un enseignant demande un blâme contre Khadir
Publié le 28 décembre 2008 à 08h51 | Mis à jour le 28 décembre 2008 à 19h24
Ian Bussières Le Soleil |
(Québec) Déplorant la participation du député de Québec solidaire Amir Khadir à une manifestation contre le président américain George W. Bush, un enseignant du Cégep de Sainte-Foy, Gilbert Gagnon, a décidé de porter plainte au président de l’Assemblée nationale.
Imitant le geste du journaliste irakien Muntadhar Al-Zeidi, le Dr Khadir et d’autres manifestants avaient lancé des chaussures en direction d’une photographie du président américain la semaine dernière devant le consulat américain à Montréal.«Moi non plus, je n’aime pas le président Bush, mais je trouve que le geste n’est pas acceptable. Il encourage la violence, et son geste constitue selon moi un manquement grave à la dignité et aux devoirs d’un député», indique M. Gagnon, qui demande à l’Assemblée nationale de prendre les mesures qui s’imposent.
Le professeur du département d’imagerie médicale n’apprécie pas non plus le message que lance ce geste. «Moi, je ne voudrais pas que mes élèves se mettent à me lancer des souliers! Peut-être que c’est un geste accepté en Irak, mais pas ici.»
M. Gagnon n’espère rien de moins qu’une réprimande officielle de la part du président de l’Assemblée nationale envers le député de Mercier, premier représentant de Québec solidaire à siéger à Québec. «J’ai envoyé mon message à François Gendron, qui était président avant le déclenchement des élections, et on m’a envoyé un accusé de réception en plus de m’assurer qu’on le transmettrait au prochain président, qui sera nommé lors de la reprise des travaux de l’Assemblée nationale le 13 janvier», explique-t-il.
Comme Michaud
L’enseignant compare la situation à celle de l’ex-député Yves Michaud, envers lequel le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard avait adopté une motion de blâme dénonçant ses propos tenus envers les minorités ethniques lors des États généraux sur le français en 2000.
M. Michaud avait alors soutenu que les Juifs avaient le sentiment «d’être le seul peuple au monde qui a souffert dans l’histoire de l’humanité» en plus de qualifier l’organisation juive B’nai Brith de «phalange extrémiste du sionisme mondial».
«M. Michaud n’était même pas député quand il a tenu ces propos controversés, alors que M. Khadir l’est. Il faut responsabiliser cet homme-là», conclut M. Gagnon, ajoutant qu’il avait également songé à porter plainte auprès du Collège des médecins du Québec.
Cachez ce soulier…
Publié le 04 janvier 2009 à 10h46 | Mis à jour le 04 janvier 2009 à 10h48
Éric Martin La Presse |
Les raids israéliens sur Gaza ont tué plus de 400 personnes la semaine dernière. Depuis le début de la guerre en Irak, en 2003, plus de 700 000 civils sont morts. Le journaliste qui a lancé des chaussures à George W. Bush pour dénoncer l’occupation américaine de son pays risque 15 ans de prison. Or, ces jours-ci, ni l’horreur de la guerre ni le sort de ce journaliste, pourtant brutalisé par les policiers après son arrestation, ne semblent préoccuper outre mesure les habitués des pages d’opinion du Québec.
Le plus urgent? Clouer au pilori le député de Mercier, Amir Khadir, parce qu’il a participé à une manifestation de soutien au journaliste emprisonné où les gens prenaient part à une action symbolique de «lancer du soulier». Depuis, on s’affaire chez les chroniqueurs- vedettes et dans les courriers des lecteurs à lancer des savates au Dr Khadir. Le geste ne serait pas «digne» du décorum attendu d’un député.
Un malaise compréhensible
M. Khadir n’est pas un député «comme les autres», et il fait des gestes inattendus. Même à gauche, certains sont décontenancés de voir un député descendre dans la rue et participer à des actions militantes. Il est compréhensible que cela crée la surprise, d’autant plus qu’il s’agit d’un des premiers gestes du député après sa prestation de serment.
Mais avant de jeter la première pierre, ou la première godasse, peut-être faut-il se demander si la poutre n’est pas dans l’oeil de celui qui regarde. D’où provient la définition du «décorum» attendu d’un député? Le régime parlementaire britannique nous a habitués à voir des parlementaires complètement assujettis à leur chef et à la ligne de parti. Ce sont ces institutions qui façonnent en profondeur les comportements attendus et qui génèrent ce qu’il convient d’appeler du conformisme.
Peut-être est-il temps d’opérer un retour critique sur la perception traditionnelle du rôle de député? Cela serait plus indiqué que de créer un précédent qui viendrait limiter la liberté d’expression des députés et qui découragerait leur engagement critique dans une époque où nous en avons bien besoin. L’anticonformisme d’Amir Khadir pourrait bien être un vent de fraîcheur pour la politique québécoise. Il faudra pour cela que l’on surmonte les appréhensions premières que suscite la moindre polémique et réapprendre cet «art perdu de la controverse», ce qui nous rend pour le moment frileux dès lors que se trouvent brassés «le confort et l’indifférence».
Violence symbolique ou réelle?
Certains commentateurs vont jusqu’à dire que le geste de M. Khadir était «violent», craignant que le député lance bientôt son siège à la tête de M. Charest, un prétexte suffisant pour le faire taire préventivement (et au plus vite)! Il est assez troublant qu’on en vienne à dénoncer à hauts cris cette prétendue «violence symbolique» tout en taisant la violence concrète, les injustices patentes et les conflits politiques meurtriers, preuve que la guerre, lointaine et virtuelle, a toujours «un mal fou à accéder au statut de réel». Le «scandale» du lancer du soulier vient occulter l’inhumanité de la guerre elle-même: «la forme mange le fond». (…)
On sait qu’une certaine classe de gens ne digère pas l’élection d’un député de gauche au Québec, et se trouve prête à faire flèche de tout bois pour le discréditer et le bâillonner. La liberté d’expression, celle du journaliste al-Zaïdi tout autant que celle du député militant Khadir, pourront bien être bafouées, et les horreurs de la guerre gommées au passage… qu’à cela ne tienne, pourvu que les choses reviennent à la normale: «business (and war) as usual».
Dans la société du spectacle, on préfère s’indigner de l’anecdotique pour mieux ignorer la violence muette qui suinte des pores du système. Cachez ce soulier (et cette guerre) qu’on ne saurait voir, c’est indécent!
L’auteur est candidat au doctorat en pensée politique à l’Université d’Ottawa et il a été membre du comité de coordination national de Québec solidaire en 2006.
Amir Khadir persiste et signe
Publié le 14 janvier 2009 à 07h10 | Mis à jour le 14 janvier 2009 à 07h12
Malorie Beauchemin La Presse |
(Québec) Avoir lancé un soulier en direction d’une affiche du président américain George W. Bush est un geste «honorable», selon le premier député élu de Québec solidaire, Amir Khadir, qui défend non seulement son geste, mais n’hésiterait pas, non plus, à le refaire.
«Je pense que ce geste, comme symbole, est un geste qui honore le député que je suis», a souligné M. Khadir, peu avant de franchir pour la première fois la porte des députés au Salon bleu de l’Assemblée nationale.
Le geste «symbolique», lors d’une manifestation anti-Bush en décembre devant le consulat américain à Montréal, se voulait un hommage au geste d’un journaliste irakien, qui a lancé véritablement son soulier vers le président des États-Unis lors d’un point de presse. M. Khadir a dit qu’il voulait, par ce geste, s’attaquer au «symbole du mensonge, de la manipulation, de la mort» et dénoncer «une puissance militaire qui a tué 600 000 personnes en Irak».
Mais venant de la part d’un parlementaire, le geste avait soulevé plusieurs critiques, dont celles d’un enseignant du cégep de Sainte-Foy, qui a porté plainte à l’Assemblée nationale.
Selon M. Khadir, les électeurs de Québec solidaire s’attendent à ce que leur seul représentant au Parlement soit libre de ses opinions «sur des enjeux, qui, malheureusement, ne trouvent pas assez de résonance auprès de nos décideurs publics».
«C’est de nos impôts que le gouvernement fédéral puise pour participer aux efforts guerriers de nos voisins américains, a estimé le député de Mercier. C’est des millions de dollars que nos gouvernements dépensent en défense, et, lorsque nous sommes appelés avec des citoyens à prendre position, il est de notre responsabilité d’intervenir.»
M. Khadir a comparé son geste à celui de l’ex-ministre Philippe Couillard, qui, deux mois après sa démission, s’est joint à une entreprise qui fait la promotion du privé en santé, après avoir fait pendant cinq ans «des professions de foi en faveur du système de santé public».
«Ça, c’est un geste déshonorant pour la fonction de député, a dénoncé le député de Mercier. Je blâme (M. Couillard) et je sens une profonde trahison personnelle. Il a trahi ma confiance, il a trahi la confiance de centaines de milliers, de millions de Québécois.»
Au moment d’entamer une mini-session parlementaire extraordinaire, M. Khadir a énuméré certaines mesures qu’il aimerait voir apparaître dans l’énoncé économique de la ministre des Finances présenté aujourd’hui. Entre autres, M. Khadir réclame la hausse du salaire minimum à 10,20$.
Convergence : Khadir veut rencontrer Péladeau |
Nouvelles Générales – Enjeux | |||
Écrit par Gabrielle Duchaine | |||
Vendredi, 30 Janvier 2009 15:52 | |||
Préoccupé par certains enjeux du conflit de travail au Journal de Montréal, Amir Khadir invitera Pierre Karl Péladeau à le rencontrer dans les prochains jours pour le sensibiliser aux dangers de la convergence médiatique.
Le député de Mercier de Québec Solidaire a le dossier particulièrement à coeur, les bureaux du Journal étant situés dans son comté. «Cela ne touche pas seulement les travailleurs, mais aussi plusieurs commerçants des environs et, plus largement, toute la population», dit-il. Ce qui l’inquiéte plus que toute autre chose, ce sont les demandes de Quebecor liées à la convergence illimitée entre ses différentes plates-formes médiatiques.
«L’enjeu de ce conflit, c’est la diversité de l’information. Il y a un danger de perdre des sources de nouvelles», a-t-il confié à RueFrontenac.com après une visite sur la ligne de piquetage, vendredi après-midi. «Il nous faut le plus grand nombre de plumes, pas le contraire, dit-il. Sinon, c’est une menace à la démocratie.» Il fait notamment référence à la crise financière qui frappe particuliérement fort aux États-Unis et qui, selon lui, est liée à «l’impunité grandissante des médias et de l’opinion publique envers les décideurs». «Ici [au Canada], on savait que George Bush prenait de mauvaises décisions, mais les Américains, eux, n’avaient pas accès à cette information. |
QS: transport en commun et économie sociale pour sortir de la crise
Publié le 23 février 2009 à 17h05
Karim Benessaieh La Presse |
Le Québec devrait profiter de la récession pour prendre le virage de l’environnement et de la justice sociale, notamment en investissant dans le transport en commun et l’économie sociale, estime le député de Québec solidaire Amir Khadir.
«La crise actuelle, selon nous, est une belle opportunité pour bousculer, pour emmener de plus en plus de gens à prendre le virage vert dont notre économie a besoin», a déclaré M. Khadir à sa sortie cet après-midi d’une rencontre avec la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, au Centre du commerce mondial de Montréal.
L’énoncé économique déposé le mois dernier par la ministre n’a pas répondu à ses attentes, explique-t-il. Il a plutôt proposé un plan en sept mesures qu’il qualifie de «vigoureuses» pour favoriser une «transformation qui fasse en sorte qu’on échappe à ce modèle qui nous confine de fois en fois à des crises répétées».
D’abord, investir dans le transport en commun, «parce que ça génère beaucoup de travail, et c’est une manière pour le Québec d’échapper à sa dépendance à des moyens de transport très énergivore.» Ensuite y aller d’investissements massifs dans l’économie sociale, qui génère déjà quelque 120 000 emplois au Québec. «En dépit des apparences, c’est une économie déjà plus importante par exemple que l’aérospatial, qui est un des fleurons de notre industrie. Ça créé plus d’emplois et c’est plus de volume sur le plan économique.»
Il demande l’abolition des partenariats public-privé, estimant que plus d’une décennie d’expérience, notamment en Grande-Bretagne, ont démontré leur inefficacité.
M. Khadir suggère également la création d’un vaste chantier de logements sociaux, une meilleure efficacité énergétique, la diminution de ratio élèves-enseignants ainsi qu’une hausse des prestations d’aide sociale et du salaire minimum. La ministre Jérôme-Forget, selon le député de Québec solidaire, a montré «beaucoup d’écoute».
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Le député Khadir en quatre questions
Publié le 28 février 2009 à 05h00 | Mis à jour le 28 février 2009 à 05h00
À la veille du conseil national de Québec solidaire, qui se tient à Québec en fin de semaine, Le Soleil s’est entretenu avec le député de Mercier, Amir Khadir.
Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve
(Québec) En décembre, Amir Khadir a été le premier candidat de Québec solidaire (QS) à être élu député. Depuis, il a commencé à apprivoiser l’Assemblée nationale et a dû s’expliquer mille fois sur la pertinence de lancer une godasse sur une photo en noir et blanc de George W. Bush devant le consulat des États-Unis à Montréal. Au moment où commence le conseil national de QS à Québec en fin de semaine, Le Soleil s’est entretenu avec lui pour parler de son nouveau boulot, de la Caisse de dépôt et placement, de la reconstitution de la bataille des plaines d’Abraham et de ses conversations avec de jeunes adéquistes chez Ashton.
Q Comment vont les choses à l’Assemblée nationale depuis que vous avez été élu député?
R «Ça se passe très bien. J’ai été agréablement surpris par l’accueil à l’Assemblée nationale. Il y a une espèce d’esprit de camaraderie, d’esprit de corps. Sans doute qu’il y a un peu du fait que je suis tout nouveau. Un peu la curiosité du jour. Donc, ça attire un peu de sympathie particulière. (…) Même de la part de mes collègues de l’Action démocratique. Par exemple, à ma gauche il y a M. Gérard Deltell, une personne remplie de courtoisie et d’égard pour tous ses collègues y compris moi, malgré le fait qu’il y a beaucoup qui nous sépare sur le plan des idées, du programme. Il en va de même pour la partie gouvernementale, le PQ, tout ça. (…) Mais ce que je vois surtout, c’est qu’il y a surtout beaucoup d’attentes dans la société, même les gens qui n’ont pas voté pour nous à Québec solidaire sont très contents de voir finalement qu’on a trouvé notre place, d’entendre ce qu’on a à dire.
Q Que pensez-vous des pertes à la Caisse de dépôt?
R (…) Pourquoi dans l’histoire de la Caisse de dépôt on s’en tient à vouloir accuser soit M. Charest, soit M. Landry. Ce n’est pas des personnes – M. Charest ou M. Landry – qui ont entraîné la Caisse dans ce gouffre. Ils n’ont pas agi en vase clos. C’est un environnement politique, c’est surtout une idéologie économique, un dogme qui les a poussés là, qui disait que les marchés allaient tout réguler, d’arrêter d’intervenir dans l’économie. C’est pour ça qu’ils ont abandonné la mission économique de la Caisse. D’ailleurs, Mario Dumont dont on a dit qu’il a sonné l’alarme sur les pertes, c’est le même Mario Dumont qui le premier a demandé que la Caisse aille pour les rendements maximums. Donc, ils étaient tous pris dans ce piège.
Q Que pensez-vous de l’annulation de la reconstitution de la bataille des plaines d’Abraham?
R (…) C’est sûr que c’était intenable, l’idée de célébrer une défaite. Ça, c’est évident. Maintenant, c’est profiter de cet événement pour permettre de changer de culture. parce que les plaines d’Abraham, c’est quand même une bataille. C’est le règlement d’un conflit entre nations, alors que nous, on propose comme groupe pacifiste d’autres méthodes de règlement de conflit. Surtout, on critique que dans tout ce qui en a découlé, comme règlement politique, comme soumission d’un peuple à un autre, il y a un troisième peuple, des nations autochtones qui ont été complètement oubliées, qui en ont payé lourdement le prix. C’est le moment ou jamais de revenir là-dessus ensemble dans une nouvelle culture de paix. (…) Une chose qui est certaine, c’est que ce débat-là doit se faire à l’écart de tout chauvinisme. Le peuple du Québec veut son émancipation autrement que par les ressentiments vis-à-vis les Anglais. La quête de l’émancipation du Québec d’une manière inclusive qui a horreur des propos extrémistes qui ont été tenus par certains acteurs malheureusement nationaleux.
Q Maintenant que vous voyez Québec un peu plus souvent, qu’est-ce que vous aimeriez voir dans cette ville?
R J’aimerais voir des gens un peu plus ouverts. (…) Cesser d’être alimentés par la culture des radios-poubelles. C’est de laisser tout le champ libre à ses André Arthur, à ses Jeff Fillion, à ses Sylvain Bouchard qui font une très mauvaise presse à Québec. (…) Moi, j’ai vu des jeunes, le 14 janvier au soir chez Ashton, parce que notre session a fini à 11h30, je suis allé là-bas manger une bonne poutine avec quelque chose dessus sur recommandation d’un gars qui était sympathisant de l’ADQ. Les jeunes là-bas étaient très sympathiques à nous, mais il y avait aussi des sympathisants de l’ADQ. C’est des gens qui avaient les mêmes interrogations. Leur coupure avec les partis traditionnels était motivée par la même chose. Ils se sentent abandonnés par les élites politiques et économiques. Je leur donne raison. Mais ce n’est pas une bonne raison de tomber dans la démagogie des gens de droite, de tourner ça comme un ressentiment contre les plus faibles, contre les syndicats, les femmes, les immigrants, l’État, pour oublier les principaux responsables qui sont les élites économiques les plus riches qui ont profité de cet état de choses.»