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Montréal sans accent : affichage sauvage et effacement culturel

Montréal sans accent : affichage sauvage et effacement culturel

Dans cette galerie composée d’une vingtaine de photos prises au fil de mes balades à pied dans Montréal — principalement dans le Mile End où j’ai vécu en 2016 —, je vous invite à observer un phénomène aussi discret que révélateur : l’anglicisation spontanée de l’espace public par les citoyens eux-mêmes.

Ici, pas de grandes affiches commerciales ni de campagnes d’affichage gouvernementales. Seulement des autocollants, des petites annonces bricolées, des graffitis de passage, souvent apposés à la va-vite sur un poteau, une boîte aux lettres ou un mur décrépi. Pourtant, ce langage anodin, informel, intime, s’exprime presque toujours… en anglais. Missing Cat plutôt que Chat perdu. Des slogans militants, des invitations, des mots d’amour ou de rupture — tous dans la langue de l’empire culturel dominant.

C’est cette prolifération d’anglais « sauvage » qui m’a frappé. Pas seulement dans les quartiers centraux dits gentrifiés, mais aussi dans d’autres secteurs du Grand Montréal. Elle trahit un changement plus profond, sociologique, celui d’une génération qui s’exprime et pense spontanément dans une autre langue que celle du territoire.

Enfin, il y a ce que mes oreilles entendent, jour après jour. Le murmure lent d’un glissement linguistique devenu vacarme. Dans le Plateau-Mont-Royal, mon quartier d’origine, ancienne forteresse péquiste qui a voté OUI à plus de 60 % en 1995, l’anglais est toujours plus audible. Au parc La Fontaine, dans les autobus de Rosemont ou les rues de Laval, les adolescents discutent, rient, s’interpellent… uniquement en anglais.

Cette galerie n’est pas qu’un inventaire visuel. C’est une alerte. Un constat tangible d’un effacement progressif, presque imperceptible à ceux qui ne lèvent pas les yeux. Car même la détresse du quotidien se vit désormais en anglais, sans que personne ne s’en étonne.

Faites défiler, observez, partagez. Parce que chaque affichage compte. Parce que l’espace public parle — et qu’il ne nous parle plus en français.