Quelques axes à tenir en direction du congrès national du Bloc québécois
En fin de semaine prochaine, des centaines de délégués du Bloc Québécois convergeront vers Rimouski pour participer au Congrès national du parti. Cet événement est d’autant plus important qu’il s’avère le premier grand rendez-vous des souverainistes depuis l’amère défaite qu’a subie le Parti québécois le 7 avril dernier.
Il va sans dire que l’actuelle période politique est un creux de la vague pour le mouvement indépendantiste au Québec. D’un angle plus pessimiste que d’un simple creux, le retour au pouvoir d’un gouvernement libéral majoritaire est peut-être un coup fatal et que nous sommes en processus irréversible de «louisianisation». Mais d’un point de vue comme de l’autre, puisque nous sommes démocratiquement maîtres de notre destin, cette période est critique pour l’avenir du mouvement indépendantiste et du Québec en général. Pour le meilleur comme pour le pire, c’est aussi une occasion unique pour redéfinir les bases stratégiques qui orientent le mouvement.
D’une perspective sociologique, je rajouterai aussi que nous entrons dans une phase où le flambeau doit être impérativement transmis à des leaders des nouvelles générations. En ce sens, un discours moderne et clairement républicain, donc antimonarchique, préconisant une réforme des institutions démocratiques du pays pourraient être au cœur de la relance de l’option. Ici, j’en suis convaincu, c’est notre meilleur angle d’attaque contre le système fédéral et archaïque. À moyen terme, nous devons impérativement faire remonter la vague du mouvement indépendantiste. Or, dans le contexte où il y a dans le mouvement deux courses à la direction en parallèle, l’une au Bloc l’autre au PQ, il faut concevoir les enjeux au-delà de la simple plateforme politique qui sera adoptée au congrès du Bloc à Rimouski.
La souveraineté, c’est un peu révolutionnaire. On y associe souvent les mots liberté, renouveau, changement, et je crois que ça peut coller aux moins de 40 ans, qui devront définir leur propre vision. Je refuse que notre projet au Québec soit juste de réparer des nids-de-poule. La souveraineté serait l’occasion de faire un grand ménage dans la structure politique pour avoir une démocratie du XXIe siècle.
– Léo Bureau-Blouin
Ainsi, avec un regard tourné vers l’avenir, nous devons préparer le Bloc à poursuivre sa mission à l’effet de promouvoir l’indépendance du Québec. Mais d’un parti qui était à la remorque d’un PQ amorphe sur cette question, il doit maintenant devenir une locomotive. Car il m’apparaît indéniable que le Bloc québécois est actuellement le meilleur véhicule politique pour rassembler les indépendantistes de tous les horizons. Comme l’explique ici Étienne Forest dans La Presse, «avec la pluralité des mouvements et partis souverainistes sur la scène nationale, le Bloc doit pouvoir accueillir tous les militants de façon neutre». En ce sens, il m’apparaît impérieux d’aménager une place aux membres d’Option nationale et de Québec solidaire, voire aux souverainistes sans affiliations partisanes.
Le Bloc québécois doit contribuer à la cause nationale en faisant la promotion active et la pédagogie de l’indépendance et en devenant un terrain neutre et ouvert à tous les souverainistes qui désirent contribuer à son progrès, qu’importent leurs allégeances partisanes nationales.
– Étienne Forest
Bien sûr, le travail parlementaire à Ottawa est important pour surveiller, défendre et faire entendre les intérêts du Québec, mais pas au point de mettre en veilleuse la promotion de l’indépendance. Pour ce faire, il faut changer de paradigme ! Or, j’appuie totalement l’idée du candidat à la direction du Bloc, Mario Beaulieu, à l’effet que chaque député bloquiste prenne 50 000 $ de son salaire (soit la différence entre le salaire d’un député fédéral et celui d’un député provincial) pour le consacrer à la promotion de la souveraineté du Québec. Il va sans dire que d’éventuels députés autant impliqués garderaient le cap sur l’objectif du pays. Puis, la gestion de ce fonds animera certainement les exécutifs locaux quant aux actions à générer.
C’est en mettant l’indépendance de l’avant de façon claire et constante, en expliquant notre projet de se donner un pays de façon positive, que nous allons aussi ramener une dimension essentielle du militantisme : celle du plaisir de travailler pour une cause juste et noble, celle de l’autodétermination des peuples, celle du Québec libre !
– Mario Beaulieu
à propos de la course à la chefferie
Parlant de Mario Beaulieu et de la course à la direction du Bloc, je suis heureux qu’il y ait justement une vraie compétition pour que nous puissions faire un débat d’idées en profondeur. Or, je remercie sincèrement Mario Beaulieu de donner cette occasion aux militants de faire valoir des idées dans le cadre de cette course. Le danger qui nous guettait avec un couronnement était l’évacuation du bilan à faire, voire de s’imaginer que la popularité du Bloc reviendra naturellement sans faire aucune vague. Ce n’est pas en se faisant oublier des médias et de la population que nous retrouverons notre pertinence politique.
Personnellement, je n’ai aucun «à priori» par rapport à l’autre candidat à la chefferie, André Bellavance. Ni positivement, ni négativement. Tout ce que je savais de lui, c’est qu’il était l’un de nos derniers rescapés de la vague orange. Or, disons que je m’inquiétais d’un sobre couronnement, sans échos médiatiques, sans remise en question, sans intérêt et sans légitimité officieuse auprès de la population.
Mais bon, je sais aujourd’hui qu’André Bellavance à la confiance de l’establishment et de l’aile parlementaire. Il est physiquement plus beau et certainement plus sécurisant envers le québécois moyen. Pour ma part, je ne demande pas mieux que d’apprendre à le connaitre davantage. En ce sens, cette course est aussi une occasion pour lui de se faire connaitre auprès des membres et de trouver à franchir le mur médiatique. Car pour l’instant, M. Bellavance souffre d’un manque de notoriété. En bien ou en mal, personne n’a pour l’instant rien à dire sur lui.
Ce n’est pas seulement en se parlant entre nous que nous avancerons. Il faut rejoindre toutes les Québécoises et tous les Québécois. Je veux un Bloc inclusif. Je crois à une coalition du Bloc Québécois au sein de laquelle les forces vives souverainistes continueront de s’unir à tous ceux et toutes celles qui croient que le Québec mérite d’être respecté
– André Bellavance
En contrepartie, Mario Beaulieu est médiatiquement connu et reconnu comme un nationaliste radical. En ce sens, sa présence dans la course rafraîchit les idées et ravive la flamme indépendantiste auprès des plus militants. Mais là où Beaulieu peut ramener à bord les plus convaincus et relancer l’option, il peut inversement repousser les électeurs moins nationalistes (genre, ayant voté pour le NPD).
Alors, sans aucun parti-pris pour un clan où l’autre, mais dans l’intérêt du Bloc en général, je pose ici la question à savoir qui des deux aspirants est le plus rassembleur pour nous amener vers l’élection et faire augmenter notre députation ? Puis après, en considérant que le Bloc au Canada sera toujours dans l’opposition éternelle, mais qu’il peut ainsi devenir le maître d’œuvre d’une stratégie nationale au centre de l’option indépendantiste, qui des deux candidats pourra le mieux assumer la force morale qu’impose cette mission ?
En terminant, j’espère que tous les membres du Bloc comprendront qu’en ces temps cruciaux pour l’avenir du mouvement indépendantiste, nous n’avons pas le luxe de nous permettre une division de plus lorsque nous consacrerons notre nouveau chef. En effet, les radicaux comme les modérés sont nécessaires à la relance du Bloc québécois, voire carrément du mouvement indépendantiste. Le premier est fondamental pour assurer le travail de terrain et la cohérence de la direction, l’autre est essentiel pour convaincre et ouvrir des canaux diplomatiques avec les autres options. Or affaiblis comme nous-sommes présentement, nous ne pouvons encaisser la perte d’un des deux camps. Bref, que notre futur chef soit Mario Beaulieu ou André Bellavance, notre défi collectif au sortir de cette course sera d’être devenu plus fort… et surtout pas le contraire.
Mais si nous demeurons unis et jouons bien nos cartes, le Bloc québécois redeviendra un choix incontournable lors du rendez-vous électoral de 2015.
En résumé je me sers de l’occasion pour préconiser 6 axes :
- Axe indépendantiste : Le retour d’un discours clairement indépendantiste, affirmé et sans complexe (il faut remplacer le terme souveraineté par celui de l’indépendance dans tous les documents du parti).
- Axe de convergence : Le Bloc ne doit plus être à la remorque d’un seul parti provincial, mais devenir lui-même une locomotive à la tête du projet de pays. En ce sens, il doit devenir rassembleur pour coaliser l’ensemble des sympathisants de toutes les formations souverainistes (du PQ en passant par ON et QS) puis de générer un pont avec les nationalistes de tous les horizons en remettant les intérêts du Québec au centre du programme (oui, il faut aussi s’ouvrir à la CAQ).
- Axe de communication: Que chaque député bloquiste prenne 50 000 $ de son salaire – la différence entre le salaire d’un député fédéral et celui d’un député provincial – pour le consacrer à la promotion de la souveraineté du Québec. Avec 20 députés du Bloc québécois, cela donnerait 1 million $ pour la promotion de l’indépendance.
- Axe républicain : Intégrer l’abandon du serment à la reine à la stratégie indépendantiste du Bloc Québécois. Cette action de défiance du système fédéral s’appuierait sur une logique républicaine interpellant le rôle du citoyen dans une démocratie. Ce qui permettrait non seulement de promouvoir notre idéal républicain, mais ainsi une réforme démocratique pour le Québec… voire le Canada.
- Axe nationaliste : faire connaitre le Québec sur la scène internationale par l’entremise du sport et s’engager à tout faire pour développer une équipe nationale de Hockey à l’instar de ce que l’Écosse a réussi au football.
- Axe international : organiser des missions diplomatiques à l’étranger et faire des alliances stratégiques dans des pays ciblés (France, pays de la francophonie, Écosse, Catalogne, États-Unis, Amérique du Sud, Russie). Par exemple : d’aller dans des forums internationaux pour favoriser la signature du Québec à l’accord de Kyoto en tant que nation indépendante du Canada.