Je quitte Projet Montréal…
C’était un secret de Polichinelle que je réfléchissais depuis plusieurs mois à cette perspective. En effet, j’étais insatisfait de notre logistique interne dans le Plateau-Mont-Royal. Dans ces circonstances, je ne pouvais plus agir adéquatement comme conseiller auprès de mes concitoyens, car le lien de confiance était rompu entre moi, ces derniers, et l’exécutif.
En effet, j’ai été laissé seul au front à devoir répondre à une multitude de demandes et commentaires des citoyens. Or, vous n’êtes pas sans savoir que dans notre super équipe du Plateau, c’est à certains élus de répondre aux citoyens, et aux attachés de faire l’essentiel du développement politique. Cette configuration découle de la volonté du maire d’investir toutes les ressources humaines dans la recherche et le développement. Parallèlement, nous n’avons pas de directeur de cabinet, pas d’attaché responsable aux communications, pas de préposé à la réception (dans ce qui est devenu un bunker opaque). Puis le soutien politique est seulement offert à certains élus.
Finalement, il me devenait très difficile à faire évoluer des dossiers (le développement du Quartier vert ici étant ici un exemple probant). Puis, vous le savez, c’est classique en politique, quand tu veux noyer ton chien, tu dis qu’il a la rage. À partir de là, quand j’ai compris qu’aucun de mes dossiers ne pouvait adéquatement aboutir s’il pouvait me mettre en valeur, je me devais de les refiler à d’autres intermédiaires. Ainsi, quelque peu démotivé, je devenais tranquillement un agent libre en occupant mes énergies vers d’autres sphères d’intérêts politiques… d’autant plus que je n’avais plus rien à perdre. En définitive, j’en conviens, il était inconcevable pour tous de reproduire un autre mandat dans cette configuration; il fallait donc trouver une solution.
Cela dit, sachez que j’ai toujours Projet Montréal tatoué sur le cœur (pour reprendre une expression formulée par François Limoges). Or, même si j’ai décidé d’opter pour l’indépendance, je crois toujours à la nécessité d’appliquer le programme de Projet Montréal. En ce sens, je compte demeurer un allié objectif du Parti, voire un partisan de l’élection de son chef à la Mairie de Montréal.
Puisque mon implication dans Projet Montréal remonte à son origine, je suis conscient qu’il pourra être difficile pour certains militants de comprendre ma décision. Mais sachez que cette décision, bien qu’émotionnellement difficile à prendre, est pesée, voire réfléchie depuis plusieurs mois. Puis, en définitive, elle s’inscrit dans une logique, c’est-à-dire de pouvoir donner un service plus honnête à mes concitoyens. Je ne serai plus pris entre l’arbre et l’écorce. Puis, je serai maintenant libre de défendre mes dossiers dans ce que je juge l’intérêt de mon district. Assurément, ce ne sera pas mauvais pour la démocratie locale puisque nous étions tous du même parti dans le Plateau.
Subséquemment, il ne faudra pas ici chercher à trouver une raison unique pour expliquer mon départ. En effet, c’est un ensemble de facteurs qui m’auront amené à prendre cette décision. Pour la petite histoire toutefois, je dois admettre que la crise interne issue de la phase 1 d’apaisement dans le Plateau aura généré son lot de cicatrices: dans mon cas, elle aura causé un bris de confiance face à tous ceux qui savaient qu’il n’y aurait pas de mesures de corrections dans mon district malgré nos engagements publics à cet effet. Durant cette crise, interne et publique, on m’aura même reproché d’être en communication avec les citoyens envers qui nous avons des comptes à rendre… supposément parce que c’était des «ennemies du Parti». Partisanerie, je te hais.
Or ici, c’est littéralement un conflit de valeurs quant à la conception du rôle d’un conseiller municipal. Être conseiller, c’est une dynamique bidirectionnelle. Dans un premier temps, oui, nous avons été élus pour appliquer un programme. En ce sens, il faut le promouvoir et être solidaires de nos décisions (encore faut-il être préalablement consultés). Cependant, nous sommes aussi des représentants d’une communauté donnée; et d’ailleurs, nous représentons aussi les gens ayant voté contre nous. De me lancer la pierre parce que j’écoute les doléances de mes concitoyens s’ayant vu imposés des décisions auquelles je ne suis moi-même pas impliqué (comme le rajout des vignettes)… c’est franchement frustrant. En en ce sens, j’ai une petite leçon de démocratie 101 à donner aux esprits sectaires s’appropriant Projet Montréal dans le Plateau, ces mêmes personnes exigeant la loyauté quand parallèlement elles manœuvrent en coulisse pour remplacer certains élus.
À cet effet, c’est peut-être finalement le bon moment de quitter, juste après cette belle réalisation qui est le réaménagement du parc Laurier. Ici, un gros bravo à Luc Ferrandez d’avoir maintenu le cap; et je profiterai de l’occasion pour mentionner que les résultats de notre vision arrivent au rendez-vous. En ce sens, je ne peux qu’appuyer le maire du Plateau à continuer sur sa lancée.
Donnons à César ce qui appartient à César. Cette équipe Projet Montréal du Plateau dirigée par Luc Ferrandez a fait plus que jamais dans l’histoire du quartier. Puis oui, je juge aussi que ce dernier ne cesse de s’améliorer. C’est un excellent gestionnaire, un homme de conviction doublé d’un homme d’action… qui d’ailleurs n’a pas son pareil pour gérer «le trafic» durant les conseils d’arrondissement. Bref, je ne lui reproche en rien de poursuivre les objectifs politiques issus du programme… seulement la manière de les mettre en œuvre. Quatre ans dans la vie d’une ville c’est court, cette idée de foncer sans communications préalables heurte les sensibilités et antagonise les citoyens entre eux. Pour un fondateur du Parti comme moi qui a passé des années à préparer le terrain, c’est d’autant plus fâcheux de constater un ressac de l’opinion publique envers les idées que j’ai promues avec constance. Bien sûr, il s’est fait un débat de société sur le dos du Plateau à propos des transports, mais il est temps pour nous de calmer cette dynamique, car la qualité de la vie sociale se retrouve aussi dans la manière que les citoyens communiquent entre eux.
Alors, je vous laisse ici avec ce dernier élan de rancœur. Je regarde maintenant en avant, libéré de cette situation intenable. Je fais la paix avec le passé pour me consacrer à la suite des choses. Bien sûr, il y a des correctifs à amener dans l’administration du Plateau. Or, je pense encore avoir un rôle à jouer en ce sens pour ma communauté. En étant indépendant, je retrouve une liberté d’action pour défendre les dossiers qui me tiennent à cœur sans rien demander à personne. Je suis peut-être amer de ne pas avoir eu la confiance au mérite de mon talent, mais bon, nous savions tous que la politique était un milieu très difficile avant de nous y lancer.
En conclusion, sachez que je garde d’excellents souvenirs de mon expérience à Projet Montréal. Eh oui, je considère encore plusieurs conseillers de cette formation comme des amis.
À bientôt Projet Montréal, et bonne continuité. Vous êtes une «criss» de belle équipe regorgeant de plusieurs talents complémentaires et certainement aussi la meilleure alternative pour Montréal. Dommage que je n’y ai plus physiquement ma place… mais de cœur et d’esprit je suis encore à vos côtés. Peu importe qui sort du Parti ou de la politique active, l’important ce sont les résultats tangibles et l’évolution de notre société. Étant donné mon parcours à Projet Montréal, je pars la tête haute avec un sentiment du devoir accompli.
Sereinement,
Carl Boileau
Les sacrifices sont le prix de l’indépendance
-Pierre Billon
Bonjour M. Boileau,
Soyez assurés de notre appui à votre égard.
Au delà des partis, le plus important, ce sont les valeurs, la vision et le sens de l’écoute et du respect des gens. Ce n’est sans doute pas facile de devenir indépendant, mais nous pensons que les élus de votre district qui se préoccupent des enjeux de leur ville et quartier apprécieront vos décisions courageuses et vous supporteront. C’est du moins notre cas. Nous sommes également critiques de certaines décisions et positions de Projet Montréal… Bref, nous vous souhaitons un bel avenir au niveau municipal car nous avons besoin plus que jamais de gens comme vous.
Joanne St-Laurent et Luc Prévost
harpege@videotron.ca
Je me souviens, il y a un moment de cela, d’une conversation tenue avec vous sur ce blogue. Nos points de vue sur la circulation automobile étaient fort éloignées; moi banlieusard qui utilise sa voiture quotidiennement non pas par amour des chars, mais bien par nécéssité. Même si nous sommes à des années lumières sur la question du transport, j’ai tout de même senti que mes arguments étaient accueuillis avec respect. J’ai senti chez vous la capacité à dialoguer. L’image que nous renvoie monsieur Ferrandez semble moins concilliante; l’idéologie l’emportant sur le sens pratique. Sa fermeture totale aux idées autres que les siennes semble également être un trait de caractère de cette personne. Les motifs évoqués au sujet de votre démission ont tendance à valider ces perceptions. Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter bonne chance dans vos projets futurs et surtout ne perdez pas cette ouverture aux idées des autres. Ca manque en politique de nos jours.
L’article le plus complet commentant ma démission est ici, dans le journal Le Plateau:
http://www.leplateau.com/Actualites/Vos-nouvelles/2012-10-01/article-3088095/Carl-Boileau-claque-la-porte-de-Projet-Montreal/1
Bonjour Monsieur Boileau,
je vous souhaite bonne chance dans votre nouvelle entreprise comme indépendant. Vous serait-il possible d’expliquer un peu mieux ce que vous entendez par « Cette configuration découle de la volonté du maire d’investir toutes les ressources humaines dans la recherche et le développement. » Quelles sont ces activités de R&D à laquelle vous faites allusions? Est-ce que c’est l’expertise dont parlait Monsieur le Maire parlait le mois dernier quant à l’octroi de permis et dont l’administration précédente aurait été forcée de se départir pour des raisons budgétaires?
Bien à vous, Daniel Quimper
Ça reste encore un peu difficile à comprendre mais peut-être n’est-ce pas encore tout-à-fait clair dans ta tête. Quand même, l’inauguration du parc Laurier n’a même pas une seule semaine et ta prestation ne laissait présager cette issue qu’au(x) seul(s) initié(s). D’où la surprise grandiose que je ressent et qui fait que je ressent également le besoin d’en faire part.