Le débat gauche/droite est-il présentement approprié au Québec?
C’est indéniable; depuis la défaite référendaire du OUI en 1995, le débat politique au Québec s’est déplacé du clivage identitaire souverainiste/fédéraliste vers l’axe gauche/droite. Mais au-delà des théories et des discours, avons-nous vraiment les moyens démocratiques d’appliquer par nous même un programme de gauche au Québec… voire au Canada?
Avant de répondre à mon postulat, il faut savoir que ces deux pôles politiques ne représentaient pas à la base des idéologies statiques, mais davantage des courants sociopolitiques dans une société propre. Ainsi, comme l’a si bien expliqué Jimmy St-Gelais dans cet article sur son blogue (d’où j’ai retransmis ici plusieurs concepts), certains s’interrogent encore sur les définitions et les particularités respectives de la gauche et de la droite en sciences politiques. À l’origine, cette terminologie remonte à la Révolution française (1789) où l’on a demandé aux députés de l’Assemblée nationale qui étaient favorables à un véto royal de se tenir à droite du président et les opposants de se placer à gauche.
Subséquemment, la gauche ou la droite peuvent être différentes selon l’époque ou selon le pays où on étudie… d’autant plus qu’à l’origine, ces dénominations n’étaient pas des attributs qualifiants des groupes partisans, mais un positionnement relatif quant à la vitesse d’évolution d’une société donnée. En fait, l’axe gauche-droite demeure ainsi une évaluation subjective selon l’observateur et se veut relatif selon le contexte par lequel on regarde les acteurs politiques dans un cadre donné.
Il faut saisir que dans toute communauté humaine, il y aura toujours des tensions entre les satisfaits et les insatisfaits… une énergie qui s’exprime à travers une lutte incessante entre ceux voulant conserver l’ordre existant (les conservateurs), ceux voulant le faire évoluer (les progressistes) et ceux voulant carrément le remplacer (les révolutionnaires). Et ce qui est bien fait dans cette dynamique, c’est que le changement s’opère de lui-même quand il y a une masse critique d’individus (ou de pouvoir) dans le camp des insatisfaits, signifiant ainsi que l’ordre n’est plus adapté à l’ensemble de la majorité (d’une société donné). Et heureusement pour l’évolution de nos mœurs, la démocratie a été inventée, entre autre, pour tempérer la vitesse du changement et éviter les révolutions trop radicales.
Selon la définition originale, j’oserais théoriser que tout le monde concevant moindrement l’existence de la société est d’emblée socialiste (même pour les tenants de la droite)… puisqu’il est question de décider de la mise en œuvre du changement DANS la dite société. Mais aujourd’hui, force est d’admettre que la droite représente les intérêts de l’élite économique et de leurs alliés antisociaux.
De mon côté: Fondamentalement en guerre contre le néolibéralisme
À l’intérieur d’une société donnée, il est parfaitement normal que les acteurs du débat public cherchent à s’étiqueter pour tenter de situer le positionnement de tout et chacun. Cependant, il faudra admettre que cet exercice peut quelquefois amener aux pires manifestations de démagogie… ce qui est socialement déplorable quand cette crasse propagande se fait par l’intermédiaire du journal le plus lu au Québec.
Pour ma part, parce que je suis un libre-penseur ayant quelques problèmes avec la partisanerie en politique, parce je peux faire preuve de pragmatisme quant il est question de stratégie, parce que j’ai activement milité au Parti Québécois durant plusieurs années, parce que je transporte une dimension nationaliste (le pays est à faire), je sais que certains éléments fédéralistes et/ou sectaires remettent en question mon appartenance à la gauche. Mais dans les faits, puisque je suis une entité régie par une implacable conscience sociale, puisque mes valeurs écologiques sont fondamentalement éprouvées par le néolibéralisme, parce que je suis un progressiste poussant pour une réforme démocratique du cadre politique, tout le monde devrait devoir s’entendre pour me positionner à gauche de l’échiquier.
Donc étant naturellement pour l’autodétermination des peuples (indépendantiste), je suis de facto démocrate (je l’ai bien expliqué ici). Ainsi, je ne me bat pas frontalement contre la droite classique (qui est un choix comme un autre offert épisodiquement aux citoyens) mais contre un système économique démantelant nos sociétés… et allant forcément aussi à l’encontre de la démocratie (sans collectivité, il n’y a plus de bien commun. Sans autodétermination, il n’y plus de choix collectif). Est-ce donc déduire ici que le néolibéralisme s’avère finalement un système totalitaire?
En effet, ce qu’il y a de plus insidieux avec le néolibéralisme, c’est qu’il se prétend le gardien de la démocratie face «aux idéologies» concourantes (paradoxalement les autres choix offerts dans une société démocratique). Dans les faits, nous devons réaliser que la démocratie n’est dorénavant plus une valeur de société, mais une illusion entretenue pour mieux nous manipuler (merci au Printemps Érable de nous l’avoir définitivement démontré). Rajoutez-en plus que c’est le monde financier qui décide essentiellement de nos décisions politiques, que l’Assemblée nationale est un carré de sable encadrant nos limites démocratiques et que le Québec est encore une province gérée par l’agenda d’une autre nation… et vous saisirez l’essentiel de ma perspective indépendantiste.
Bien sûr, la propagande ambiante impose aussi le néolibéralisme comme le champion de LA liberté (spécifions la liberté individuelle en opposition au bien commun). Pourtant, il n’y a véritablement de liberté individuelle que dans son expression collective; à commencer dans la capacité d’une société à pouvoir s’autodéterminer démocratiquement. Or, cette pseudoliberté néolibérale est un prétexte afin de promouvoir le «tous contre tous» et disloquer nos mécanismes de solidarité (qu’elle soit d’ordre social ou national).
Bref, en dénigrant les consciences collectives, le néolibéralisme fragmente la société en unités de consommation et annihile ainsi la coordination des peuples à s’autodéterminer politiquement pour ses propres intérêts. De surcroît, tout cela nous déresponsabilise collectivement face à l’avenir… ce qui dans une dimension écologique est carrément dramatique.
En conclusion, si je conviens qu’il est une bonne pratique d’articuler nos débats dans le vocabulaire des sociétés indépendantes (car c’est un exercice de maturité nous préparant mentalement aux choix démocratiques s’offrant dans un état indépendant) je pense qu’il est présentement futile de ne s’en tenir qu’au débat gauche/droite. En effet, nous sommes pour l’instant doublement enchaînés : non seulement la social-démocratie s’avère incompatible avec le néolibéralisme, mais nous demeurons toujours une colonie assujettie à l’ordre canadien. Le vrai débat au Québec est donc toujours le même, c’est celui de pouvoir exercer la démocratie par l’entremise d’un État indépendant.
Pour terminer, je donnerai le mot de la fin à Pierre Foglia: «Ce n’est pourtant pas une histoire de droite ou de gauche, de posture conservatrice ou libérale, ce n’est pas affaire d’opinion, il n’y a pas dans cette non-histoire le plus petit espace de discussion, de débat, cela ne peut pas relever de l’opinion. Ce n’est pas la droite et la gauche qui sont en train de creuser les plus grands fossés dans notre société, c’est la culture. Le fossé entre deux cultures? Non, celui, vertigineux, entre cultures (de droite ou de gauche) et pas de culture.»
Du choc des idées jaillit la lumière
– Nicolas Boileau
Gauche droite
L’homme de gauche, comme Staline, Pol Pot, ou Kim Il Sung, etc. s’attache la main droite dans le dos et essaie de vivre normalement en n’utilisant que sa main gauche. L’homme de droite comme Pinochet, les généraux argentins, etc. font l’inverse. C’est ce que je n’ai jamais compris dans cet éternel débat entre la gauche et la droite. Une pièce de monnaie peut elle n’avoir qu’un coté ? La réalité n’est elle pas toujours multiple ? Quel problème social est unidimensionnel ? Je crois au balancier pour régulariser les choses : après 40 ans de dépenses gouvernementales et un déficit de 600 milliards par les Libéraux qui ne peuvent plus créer de nouveaux programmes sociaux, le balancier passe de l’autre coté, de celui de Harper et de la droite.