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Posté par le 31 juillet 2013 dans BD, Cinéma

Pour en finir avec le cinéma des super-héros américains

Pour en finir avec le cinéma des super-héros américains

D’abord, je vais vous faire une confidence : je n’ai jamais affectionné les super-héros (états-uniens). Je trouve leur univers puéril et manichéen ; mais surtout, je ne comprend pas l’intérêt de s’attarder sur leurs histoires redondantes. Disons que tant ça restait dans le monde des «comics» et des jouets dérivés, j’arrivais à tolérer l’existence des ces vilains mégalomanes encapés et de leurs opposants masqués. Mais voilà que depuis plus d’une décennie, cette bande de clowns volants débordent des États-Unis en envahissant notre univers cinématographique avec des films tapageurs. J’ai beau espérer que nous puissions faire face à une mode (imposée), rien ne laisse présager l’épuisement du filon des super-héros au cinéma. Effectivement, pour le meilleur et pour le pire, Hollywood a trouvé une nouvelle recette pour étirer la sauce. Il s’agit de la profusion de suites, «remakes», «prequels», «reboots», «cross-over» et autres «spin-off».

Le terme super-héros (de l’anglais super hero ou superhero) désigne un type de héro fictif, que l’on retrouve principalement dans les comics (bandes dessinées américaines) ou dans leurs adaptations audiovisuelles. Un super-héros est généralement un type de justicier se distinguant par des capacités hors du commun, lesquelles dérivent souvent de pouvoirs surhumains ou surnaturels.

À titre d’exemple, il semblerait que Sony Pictures serait sur le point d’agrandir son univers de super-héros dans la famille de Spider-Man… pour le prochain film «The Amazing Spider-Man 4». OK ! Réalisez-vous qu’en 2013 nous ne sommes même pas encore rendus à «The Amazing Spider-Man 2» que l’on prépare déjà l’arrivée de$ nouveaux personnage$ dans le quatrième opus. Réalisez-vous ici que tout juste cinq ans après le dernier épisode de la trilogie de Sam Raimi, il est en plus question ici du «reboot» opportuniste (dix ans seulement après la naissance de Spider-Man au cinéma). Tant qu’à pousser le bouchon, à quand la rencontre de Spider-Man avec Robocop ou des Predators?

Mais nous ne sommes pas juste affligés par Sony Pictures et son univers de Spider-man. Il y aussi Fox et ses mutants, Marvel et ses projets, DC et Warner Bros essayant d’établir la rencontre entre Batman et Superman.

Mais nous ne sommes pas juste affligés par Sony Pictures et son univers de Spider-man. Il y aussi Fox et ses mutants, Marvel et ses projets, DC et Warner Bros essayant d’établir la rencontre entre Batman et Superman.

Trop c’est trop. Il n’est plus vraiment question de cinéma, mais d’une entreprise industrielle de divertissement audiovisuel. Du pain imaginaire et des jeux vidéo pour faire tourner en rond les rêves conditionnés des consommateurs masculins… voire les maintenir intellectuellement au niveau de l’adolescence.

La planète Hollywood en un seul regard

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A chacun ses héros

Bien sûr, lorsque j’étais garçonnet, j’ai moi aussi imaginé être un justicier costumé avec des super pouvoirs ? Moi aussi, dans la cour d’école, je me suis prêté au jeu de répondre à la question du pouvoir que je rêvais vouloir détenir. Mais diantre, c’était justement durant mon enfance. Puis après durant mon adolescence, afin de pouvoir influer sur ma vie (et par extension mon monde), je me suis logiquement détaché du monde puéril des super-héros pour orienter mon imaginaire vers la réalité. Si bien que depuis, mes héros s’avèrent des personnes réelles ayant participé positivement à l’histoire, voire carrément des modèles humains œuvrant toujours à l’évolution de notre monde. De la sorte, je ne suis plus en mesure de comprendre comment un adulte peut encore s’identifier à un zozo encapé évoluant dans un monde infantile.


Puéril… ou simplement ridicule

Par ailleurs, je pense qu’il y a une forme inconsciente de lâcheté morale à s’imaginer être quelque chose d’impossible à devenir. En effet, l’être humain est un projet en constante évolution; ainsi, nous pouvons tous et chacun devenir des «surhommes» et dépasser nos limites dans la réalité. À contrario, malgré leurs incroyables pouvoirs, les super-héros modifient moins l’équilibre du monde qui les héberge que ce que l’on pourrait croire. Dans les faits, les super-héros sont essentiellement des champions de l’ordre social, c’est-à-dire des guerriers au service du système en place. En définitive, la cause du bien dans cet univers pourrait s’avérer celle des intérêts de l’Amérique; et inversement la cause des vilains celle d’agents étrangers porteurs de chaos social.


Un super-héros est aussi super que sa tenue. Allez sur http://www.WatchMojo.com pour voir Top 10 des pires costumes de film de super-héros.

Dans leur acception primordiale, les super-héros sont la plupart du temps utilisés comme des personnages symboliques (à la limite de la caricature), parfois impliqués dans des histoires purement manichéennes qui sont théoriquement destinées à un jeune public. Et quand bien même l’archétype du super-héros a connu de nombreuses mutations cosmétiques afin de l’adapter commercialement au goût du jour, il évolue toujours dans une énième variation de la même histoire circulaire.

Or justement, tout aussi imaginaire soit-il, il ne faut pas sous-estimer les capacités de l’univers des super-héros à pouvoir occuper le fantasme collectif des masses. Ainsi, le vrai pouvoir des super-héros ce n’est pas tant leurs capacités fantastiques dans des mondes imaginaires… mais leur possibilité réelle de pouvoir maintenir passifs (politiquement) une masse critique d’individus dans un âge mental pré pubère.


Rions un peu des super-héros avec le joueur du grenier

Par ailleurs, au-delà l’utilisation des super-héros comme outil d’influence politique via le désir identitaire, c’est aussi l’offre globale de la diversité culturelle qui rapetisse. Car, face à l’envahissement de la planète cinéma d’un genre culturel donné, il y a parallèlement moins d’espace pour d’autres types de films (indépendants et/ou étrangers). Réalisons-le, ce phénomène des films de super-héros prend aujourd’hui une ampleur jamais égalée dans l’histoire du cinéma. Or, devrait-on considérer ce mouvement comme un signe flagrant de manque d’inspiration des producteurs, scénaristes, acteurs… ou plutôt comme une réponse à une demande sans cesse croissante d’un public conditionné pour ce genre de production ?

Au cinéma, les franchises sont juteuses. Faites un film sur une licence connue et c’est le jackpot ! Cliquez pour agrandir

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À en croire Kathryn Arnold la semaine dernière dans La Presse, une productrice et experte de l’industrie hollywoodienne, les superproductions hollywoodiennes se remettraient en question. Du moins, cette dernière attribue la baisse du box-office à la médiocrité de ces superproductions. «Les studios essaient d’atteindre l’audience la plus large possible et croient parfois qu’ils doivent simplifier l’histoire et multiplier les scènes d’action pour séduire le public», explique-t-elle à l’AFP. «Mais le public est plus malin, a davantage d’alternatives de contenus et est connecté plus que jamais aux différents médias. Les studios doivent apprendre à ne pas être mesquins avec l’histoire quand ils font des films à gros budget».


Ces films de super-héros étaient loin d’être super. Rejoignez http://www.WatchMojo.com pour voir le top 10 des pires films de super-héros.

Bref, sans le dire ouvertement, Kathryn Arnold sous-entend ici que l’avenir appartient au cinéma plus indépendant (donc il y aurait de l’espoir). Mais en attendant que cette perspective se réalise, le public est toujours pris dans les fils tentaculaires des histoires de super-héros. Or de mon point de vue, je souscris plutôt à la pessimiste hypothèse que le public, c’est-à-dire le consommateur moyen voulant avant tout être diverti par le cinéma, est quelque part conditionné dans ses goûts cinématographiques. Et si justement l’offre de film en super-héro était comme pour le vieux concept du cercle vicieux de la saucisse Hygrade? Vous savez, le fameux dicton: Plus on en mange, plus on les aime… plus on les aime, plus on en mange. Voyez-vous, si des parents ont toujours nourri leur enfants avec du fast-food, une fois rendu adulte, c’est gens-là n’iront pas se nourrir d’eux-même avec des aliments biologiques. C’est universel, nous allons naturellement vers ce que nous connaissons… or ce que nous connaissons est plus souvent qu’autrement ce qui est aisément accessible (c’est à dire ce qui commercialement est offert au public).


Un classique: une publicité des saucisses Hygrade

L’exemple des comics (états-uniens)

Voici l’exemple qui renforcera mon hypothèse ici, celui de la bande dessinée. Ceux qui me connaissent personnellement savent que je suis un passionné de BD. Dans cette forme d’art à part entière, ma collection est diversifiée et je m’intéresse à des genres complètement différents. Cela dit, en tant qu’amateur de BD, je suis vraiment heureux ici d’être francophone. Car fort d’une base culturelle prenante assise au milieu du dernier siècle dans ce qui est dénommé par les connaisseurs «l’école franco-belge», l’univers de la BD francophone rayonne dans tous les genres d’univers.

les super-héros américains vue par le français Gotlib

les super-héros américains vus par le français Gotlib

À contrario, la BD étasunienne est toujours prise dans le canevas «comics». C’est tellement vrai que pour l’écrasante majorité des Américains, le genre «comic» EST la bande dessinée. Par extension, il faut donc réaliser que pour le public lambda aux États-Unis… il y a une méconnaissance totale de la BD (étrangère). Par ailleurs, contrairement à la BD, je ne qualifierais pas le genre «comic» à de l’art à proprement dit. Les illustrations sont simples et les possibilités de scénario intrinsèquement limitées à l’utilisation des super-héros.

exemple de couverture de plusieurs série de comics

exemple de couverture de plusieurs série de comics

Ensuite, comme si ce n’était pas assez en termes de médiocrité, le genre comic est relié dans du papier cheap. Puis, à des fins de spéculation mercantile, les comics ne sont plus disponibles en librairie après quelques semaines. Disons alors qu’on est loin de la logique artistique ici.

En guise de synthèse

En définitive, le genre «comics» aux États-Unis s’est tellement imposé qu’il n’y a plus réellement de place pour d’autres genres d’expressions dans le domaine de la BD dans ce pays. Or, il faudra certainement y voir un exemple de ce qui ne doit pas arriver dans le genre fantastique au cinéma. Mais le pire dans toute cette invasion culturelle des super-héros États-Unien, c’est qu’elle influence les modèles de valeurs publiques tout en faisant compétition à notre propre cinéma national. Bref, il est question ici de la colonisation des esprits faibles par une industrie étrangère à nos réels intérêts.

Alors, il m’apparaît nécessaire de se réapproprier notre imaginaire collectif et de valoriser les capacités d’action des citoyens dans la réalité. Face aux défis culturels auxquels fait face la nation québécoise, il est plus que temps de remiser nos jouets d’enfance au grenier et d’aller jouer dehors… dans le monde réel.

L’homme est une corde tendue entre l’animal et le Surhomme, une corde au-dessus d’un abîme – Friedrich Nietzsche

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Kints
Kints
6 années il y a

Les super héros m’intéresse 0 mais je suis bombardé quasi à tous les jours c’est très envahissant. C’est hyper pueril.

Dextarian
10 années il y a

marrant, cet article aurait été écrit il y a 30 ans, j’aurais compris la charge. Aujourd’hui, j’ai vraiment du mal. Je ne nie pas la profusion de film de super héros qui sont là pour faire du fric mais plutot sur tout l’aspet comics de ce post.

Tout d’abord oui, le comics est un genre américain. Mais l’amalgame Comics = Super héros est à mon sens un peu trop facile et surtout très stéréotypé. Beaucoup de comics n’ont aucun super héros à montrer puisque c’est essentiellement un format et non pas un genre en lui seul. Il y a énormément d’aventures de personnes sans réel pouvoirs, même s’il faut les chercher dans les boites d’éditions moins visibles. Mais ça serait la même chose si on réduisait la bd franco belge à Dupuis à travers ses séries qui durent depuis 50 ans.

Le comics est depuis longtemps plus l’apanage des seuls américains puisque beaucoup d’artistes européens et asiatiques travaillent maintenant dans les grosses firmes. C’est plutôt un genre transnational où il est possible de développer maintenant des histoires beaucoup plus dures et sombres. Et ceci depuis le début des années 80 et surtout début années 90 quand les artistes se sont un peu rebellé contre le systeme en fondant leur propre compagnie.

Alors bien sûr si on s’attache aux super héros dit patriotiques, comme superman ou captain america, nous sommes en plein dans le cliché. Maintenant, la production de la BD aux US est tellement vaste qu’il serait bien difficile de limiter le comics aux super héros. Et on ne parle pas de toutes les séries où les mutants sont mis en scène et qu’ils sont, dans les comics du moins et peut etre un peu moins au ciné, des parias. Sans compter que les séries mutantes sont beaucoup moins manichéennes et légèrement plus en phase.

Ensuite, on a des auteurs comme John Byrne qui a toujours pris soin de mélanger des aventures de super héros avec des éléments réels. Son arc sur les 4 fantastiques il y a presque 25 ans restera toujours gravé en moi par sa volonté d’allier réel et imaginaire.

Bref, je pourrais en écrire une tartine. Et c’est bien dommage de ne voir que la partie immergée de l’Iceberg, celle la plus visible et la plus stéréotypées, finalement.

Emmanuel Esliard
10 années il y a

Invités début juin par une université californienne à faire une conférence à des étudiants en cinéma, Steven Spielberg et George Lucas ont dressé un portrait inquiétant de l’évolution du cinéma américain affirmant que « l’expérience cinéma » va se raréfier, se massifier et devenir beaucoup plus chère pour le spectateur. « Il va finir par y avoir moins de salles de cinéma. Resteront des salles plus grandes et très haut de gamme (…) Aller voir un film vous coûtera 50 dollars peut-être 100, voire même 150. Ça ressemblera plus à un événement sportif. C’est ce qu’on appellera le business du cinéma. Tout le reste ressemblera à de la télévision câblée ».

George Lucas pense que le salut peut venir de la télévision beaucoup plus audacieuse et d’internet avec le VOD.

Personnellement je crois qu’il viendra plutôt d’un cinéma diversifié, nationalement et surtout culturellement. Un film à budget réduit peut avoir un grand succès, on le constate régulièrement en France, où une véritable industrie du cinéma existe toujours. J’ajoute que le nombre d’écrans est en croissance continue, avec comme dans ma ville (agglo de 120 000 habitants) deux multiplexes, un de huit salles destiné aux films dits grand-public, un autre de cinq salles accueillant plutôt les films d’auteur.

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